« C’est pas l’homme qui prend la mer, c’est la mer qui prend l’homme. » Cette première phrase de la chanson Dès que le vent soufflera, de Renaud, s’applique à merveille à Dom, père touchant de Tempête, le troisième film de Samuel Collardey, qui porte un regard tendre sur une famille simple et réaliste.
Dom, 38 ans, marin pêcheur, élève seul Mailys, 16 ans, et Mattéo, 15 ans. À cause du « grand métier », il ne passe que quelques jours par mois à terre, aux Sables-d’Olonne, et laisse ses enfants s’autogérer. Son absence s’avère pesante, surtout quand Mailys tombe enceinte par accident et doit choisir d’avorter pour des raisons médicales. Mis sous pression par une assistante sociale, Dom finit par chercher à retrouver son chemin vers sa fille, au risque de tout perdre professionnellement.
Un drame ordinaire
Ce tableau d’une famille monoparentale a une couleur particulière : tout est en grande partie vrai. Samuel Collardey – qui a déjà éprouvé sa méthode avec son premier long métrage, L’Apprenti – replonge ses acteurs amateurs, Dominique, Mailys et Mattéo Leborne, dans leurs tourments familiaux d’il y a quelques années. La grossesse et la séparation entre Mailys et Dom ont été ; d’ailleurs, au moment du tournage, le père et sa fille étaient toujours en froid.
Vérité des situations, donc, et aussi des êtres. Dom et ses enfants n’ont pas grandi dans le VIe arrondissement de Paris. Cela se voit et s’entend dans leur langue brute, qui manque souvent de mots pour exprimer les sentiments. Ces personnages à fleur de peau s’éloignent en raison de l’incompréhension. Dom, après l’interruption médicale de grossesse de Mailys, ne comprend pas la colère de sa fille et croit qu’un vêtement offert l’apaisera. Quant à Mattéo, si Dom et lui s’entendent comme larrons en foire, il prend ses distances quand son père fait peser trop d’attentes sur lui.
Une force émotionnelle brute
Malgré ces flux et reflux, l’amour filial finit par triompher et réunit les personnages autour d’un acte symbolique : Mailys se fait tatouer le prénom du bébé perdu. Le film est parsemé d’autres scènes d’une force étonnante : ainsi ce comique enlèvement de mouton qui réunit Dom et Mattéo, en quête d’un repas roboratif, mais incapables d’égorger l’animal au moment fatal ; ou la conversation au lit, après l’amour, entre Dom et sa nouvelle compagne (Carole Perineau), où celui-ci raconte sa fille, photos à l’appui.
La force que Tempête dégage doit sans doute beaucoup à la vision de Samuel Collardey : « Je ne regarde pas les gens comme si c’était des fourmis. Je me mets à leur hauteur, il n’y a pas de jugement, je les filme en me posant les mêmes questions qu’eux. » La modestie du réalisateur permet un film riche en émotions et non dénué d’accents sociaux. Certes, quelques fausses notes sont présentes. Pour le reste, vous pouvez embarquer sans hésiter aux côtés de Dom et sa famille.
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