Tenet, l'opéra scientiste nolanien oscillant entre nanard et chef d'oeuvre.

          Absurde, bourrin, zénithal, rarement un film ne m'aura laissé aussi pantois et consterné à la fois. Scénario accessoire d'une intrigue à tiroirs dont les rebondissements, constants, ne rebondissent jamais. Inutile de comprendre, il n'y a plus rien à cerner, c'est le néant qui rencontre le paradis. 
Film clair-obscur, crépusculaire, dans la veine d'un cinéma qui sature le rapport à la réalité pour revenir à une essence cinématographique primaire. Bande son stratosphérique, viscérale et jouissive. Orgasme auditif épousant un paroxysme visuel révolutionnaire. Scènes d'actions hallucinantes servies par une écriture de série B. Dialogues explicatifs, sur-explicatifs jusqu'à l'absurde. Acteurs étranges, dont les jeux, presque synthétisés, évoquent des objets mouvants dans un cadre chaotique.
Pas d'émotions sous-jacentes. Pas de psychologie subtile. Que de la surface : caractérisation par l'action présente, intrigues amoureuses d'un Shakespeare sous gnôle, enjeux dramatiques volontairement nébuleux. Montage inégal : champs-contrechamps dignes d'un téléfilm ou actions monumentales relevant d'un grand cinéma.

What the Fuck ?


Christopher Nolan est allé encore plus loin. Plus loin qu'un ambigu "Memento". Plus loin qu'un troublant "Insomnia". Plus loin qu'un sournois "Prestige". Plus loin qu'un vertigineux "Inception". Plus loin qu'un excitant "Begins", écrasant "Dark Knight" et terrassant "Rises". Plus loin qu'un gargantuesque "Interstellar". Plus loin qu'un jusqu'au-boutiste "Dunkerque".
Ainsi, Tenet apparaît comme l'ambivalence absolue, comme si son auteur cherchait à concilier une réflexion complète à un retour de jeunesse inattendu.


Nolan, ce vieux talentueux de ne pas être adulte.


Conclusion. "Tenet" est simultanément le pire et le meilleur film de Christopher Nolan. Pas étonnant pour une oeuvre palindrome qui se lie comme se délie. "Tenet" est une proposition de cinéma couillue, audacieuse, unique et inégalable. Certainement le film le plus intrigant de son auteur. Une bizarrerie de notre époque qui interroge sur le "principe" même du cinéma.

Kyle-Valdo
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le 25 août 2020

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