Ah, il est l'heure de faire mon vieux con et de tout spoiler. Je commence à cerner une répétition dans mon ressentis vis à vis des blockbuster actuels - et je dois surement être à la masse étant donné que j'en ai raté une pelleté. Genisys m'évoque Jurassic World et Dawn of the planet of the ape : la part scénaristique est importante mais se retrouve perdue dans un dialogue de sourd.
Le scénariste est de plus en plus considéré, grâce à l'émergence extraordinaire des séries depuis une dizaine d'année, sous l'avatar du showrunner guidant les histoires de plus en plus complexes - public habitué à toutes les ficelles oblige.
Dans ces 3 suites/reboot, je retrouve cette volonté de faire quelque chose de grand, borderline, et dans le cas de Terminator, d'aussi complexe qu'une série peut l'être. Le premier détail qui fait plouf, c'est qu'une série a au minimum 10 heures pour poser ses intrigues complexes, et Genisys n'a à peine le temps en 2 heures d'en démontrer les grandes lignes sans être sûr que tout fonctionne et que les personnages eux même les captent.
Mais l'un des plus gros soucis de ces scénarios, c'est de ne pas réussir à s'affranchir d'une tendance aux dialogues et expositions surlignées et horriblement chiantos et mécanique. Ca prend le spectateur pour un con et on oublie que montrer est aussi important d'expliquer (c'est d'ailleurs pour cela que la partie simiesque de Dawn est magique, tant retirer la parole libère plusieurs scènes).
Associés au second point faible, un manque de réalisateur artistes, remplacés par des yes-men exécutants, chacun de ses films ne peut prétendre à être autre chose qu'un nanard à gros budget.
Car ici intervient un dialogue de sourd. Si ces films devaient refléter l'essence du scénario, cela donnerait : Dawn of the planet of the apes - une tragédie où les singes se rendent compte qu'ils sont comme les humains, et que dans la violence/ la guerre, il n'y a ni héros ni sauveur (raté, Cesar devient un gros connard qui se venge mais le film nous le présente comme le christ) ; Jurassic World - le nouveau parc est une horreur calibrée pour le pire public de blasés (raté, le parc est présenté comme un lieu où la magie survit et le thème de john williams et des "ouah" en pagaille) ; Genisys est une saison de série à multiples rebondissement qui se doivent d'être plus espacés pour gagner en impact, bordel.
La sensation que personne n'est à bord pour raconter une histoire qui peut marcher sur le papier est un point commun à tous ces relaunch, et Fury Road est la preuve que ça peut marcher si un réalisateur artiste mène la barque (surtout si il comprend le matériau d'origine).
Genisys est un film d'une certaine tendance de l'hollywood post-moderne où le public, habitué aux intrigues improbables et nostalgiques des années 80, est sensé bouffer n'importe quoi du moment qu'on lui fait du pied sous la table. Et c'est dommage que rien ne prend, chaque début de bonne idée se fait enterrer par 1001 défauts de fabrication :
- nous voyons les pires john connor et kyle reese que la saga nous ait offert (pas vu sarah connor chronicles par contre), des acteurs déjà peut ressemblant aux autres avatars, au jeu surement pas dirigé débitant les pires conneries qui pouvaient être écrites,
- l'histoire est anti-dramatique au possible, tout le monde voyage dans le temps, la fin du monde est un événement normal dont on se fout (sauf quand sarah connor tremble des yeux en parlant que sa vie à elle est gâchée car liée à celle de 6 milliards d'autres humains), il n'y a aucun obstacle qui parait un tant soit peu être crédible. Les personnages vont de Z à A puis à B, yolo et y aura une suite bande connards. L'apocalypse selon Cameron est tellement absente que c'en est flippant.
- la réa est plate, l'ambiance ne s'installe que dans une seule scène (le T-1000 brûlé à l'acide), le montage tente de cacher que le scénario est celui d'au moins 2 films (ou 4 épisodes), sur-utilise les montages parallèle pour tenter de gagner du temps et en perd à tenter de faire des flash-back-forward-qu'on-aura-la-signification-qu'à-la-fin-oh-là-là. C'est possible de faire un film avec des effets de lumières sympa ? T-2 était plongé dans un bleu métallique obscure, T-1 dans une crasse contrastée, même T-4 avait un étalonnage cohérent désaturé post-apo. Y avait pas de budget lumière et couleur ?
- les FX sont totalement coincé dans les années 2000, le T-800 de 1984 est à peine mieux fait que celui de T-4. Pourtant, en reprenant le même plan du film original, il y avait moyen de mieux "décalquer" le jeu, la lumière, le rendu de l'original... Le reste est salement synthétiques, aucunement marquant comme les Terminator ont pu l'être.
- on a compris "come with me if you want to live" ; "i'll be back" ; le terminator tente de sourire ; des gens tendent une mains à des gens qui sont tombés... ON SAIT, ON A VU LES AUTRES FILMS.
- de l'humour donc, très très malvenu, là où T2 l'utilisais avec parcimonie et logique dans la relation entre un robot et un enfant. Le festival de la vanne creuse encore plus l'intensité dramatique qui en devient totalement vide.
- et enfin, c'est particulier, chacun jugera si c'est une bonne idée ou pas : Genisys est une suite directe du 1, avec quelques relents du 2 mais l'évinceant implicitement de la timeline, le 3 et le 4 ne sont pas pris en compte. On va foutre ça sur le dos des multivers causés par le voyage temporel, mais il manque au film LA justification pour créer ce noeud et désigner T1 et T2 dans une timeline, Genisys dans une autre. On ne dit pas qui a envoyé "Papy" (ooouuuuh futur twist, oooouuuh) ni le T-1000 dans les années 70, ni pourquoi. Le fait de balayer ça par "le t-800 n'a pas ces infos" et que ça ne trotte dans la tête d'aucun personnage fait passer ce qui pourrait être un setup pour une erreur. Con, non ?
Si plusieurs critiques tentent de sauver le film en disant que ça n'est pas la catastrophe annoncée, c'est pas non plus un nanard qui tient debout. On n'aura pas été dupes de la citation de Cameron sur l'affiche. Genisys fait n'importe quoi en nous faisant des clins d'oeil, au point où le film ressemble à un long sketch du SNL avec moins d'humour, où yolo la fin du monde.
Et perso, ça me rend triste.