Là, Takashi Miike, tu m'as un peu déçue. Vu l'absurdité du scénario conforme au manga d'origine, horde de cafards géants contre powers rangers insectoïdes, grosse baston foutraque et délirante, Je m'attendais à plus: plus de générosité, de débordements d'énergie primaire, de folie kitch, de démesure dans le ridicule ou la violence stupide. Mais si quelques moments amorcent la glissade dans la grandiose furie de la baston foutraque décomplexée et décérébrée ponctuée d'un humour intempestif, on dirait que l'ensemble est sous contrôle, les élans tournent court, ça reste sage, dégâts limités, démence entravée.
N'empêche, c'est de la pure SF japonaise(par le Miike de Yatterman, Zebraman et la guerre des Yokaï): des insectes mutants ont colonisé Mars, tout en muscles caoutchouteux et balourds sous une petite tête ahurie(très réussis les cafards entre mollesse abrutie et vélocité mortelle), survient une bande de super-héros, rebuts de l'humanité en costume spatial plastifié qui s'injectent des produits pour se transformer en semi-insectes avec leurs pouvoirs spécifiques. S'ensuit un surprenant catalogue d'entomologie en voix off listant très sérieusement les capacités des bestioles. Et voilà nos héros insectoïdes au monstrueux grimage coloré surmonté d'un brushing délirant qui prennent la pose avant de dégommer du cafard humanoïde. Sans oublier le savant dément, clown mégalo grand-guignol dont la machination les a tous sacrifiés dès le départ.
Fidèle au manga, nous avons aussi droit(avec quelques flash-back parsemant l'action) aux récits déchirants de ce qui a conduit nos protagonistes sur Mars, thèmes récurrents familiers: sauver, aider ses proches, se sacrifier parce qu'on a tout perdu...etc... et bien sur l'amitié s'impose avec force grâce aux épreuves et à l'horreur partagée.
Justement cette horreur intégrale face à ces hordes de cafards déferlant, ce désespoir en réalisant qu'ils n'auront jamais le dessus, on ne les sent pas trop. Le ton tire à la plaisanterie loufoque. Très drôle les atterrissages des navettes spatiales, tout comme ceux des têtes de cafards roulant sur le sol rouge de Mars avec ce même regard opaque parfaitement vide. Et nos insectes géants qui attendent poliment la fin des conversations avant d'attaquer alors qu'à l'inverse, les scènes de combat s'achèvent abruptement avant que tripes et membres ne jaillissent.
J'ai eu cette impression tout au long du film qu'au moment de donner libre court à une loufoquerie déchaînée, tout s'interrompait, peut-être trop appliqué à suivre la trame exacte du manga. Il s'ensuit un rythme chaotique, lenteurs, coups d'arrêt brusques, idées farfelues éparpillées, désorganisant le récit: trop de choses s'intercalant les unes dans les autres, trop d'idées à faire cohabiter.
Si j'ai bien aimé ce côté grand n'importe-quoi, le sentiment qui persiste au lendemain du visionnage est celui de n'avoir pas retrouvé l'extraordinaire tsunami de vitalité débridée qui fait Takashi Miike. Il aurait pu faire pire!