O.F.N.I.
Visuellement impressionnant, Tetsuo a ouvert des portes aux réalisateurs cultes contemporains. Que ce soit Cronenberg, Fincher ou certains frenchies comme Noé ou Kounen, ils sont nombreux à s'être...
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le 9 avr. 2013
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Pour son premier long-métrage, Tsukamoto frappe fort, très fort. Fruit de deux ans de travail, Tetsuo est un film aussi malsain que nerveux, qui propose un regard cru, désespéré et torturé sur l'industrialisation du Japon (et en général). Plus encore que cela, c'est une réflexion sur l'ensemble de la modernité.
Le film traite de nombreux thèmes associés au monde moderne. Nous avons d'abord l'aliénation, montré par le fer, qui prend littéralement la place de la peau de l'homme. Plus il tente d'y échapper, plus elle s'attache, plus elle est omniprésente. Finalement, l'homme renonce à lui-même et ne fais qu'un avec la machine, l'industrie.
Ensuite, la place accordée à la sexualité est également révélatrice. Le sexe et la relation à l'être aimé devient à l'image du monde moderne: froid, sauvage, mécanique, vidé de tout amour. Dans ce monde où la modernité ravage les personnages, les rapports sexuels disparaissent. Le phallus en ferraille qui pousse brutalement sur l'homme, puis le rejet que ce dernier subit par sa "compagne" semble être une représentation de la sexualité de l'homme moderne : frustrante, impersonnelle, parfois désespérée, comme chez les protagonistes d'Extension du domaine de la lutte.
J'y ai donc vu, comme vous avez pu le comprendre, une critique de l'ensemble des aspects du monde moderne, qui ravage l'homme. Le rythme effréné du film peut d'ailleurs être rapproché du mode de vie dans les grandes villes.
Tetsuo n'est pas un film pour tout le monde. Les partis pris extrêmes de Tsukamoto pourront en désamorcer plus d'un. Et c'est bien dommage, puisque l'esthétique de l'oeuvre est remarquable et cohérente. Étant une production à bas budget, le réalisateur a du "bricoler" et redoubler d'inventivité lors du tournage, ce qui offre une œuvre très singulière, que l'on pourra rapprocher sur ce point d'Eraserhead.
La mise en scène est assez fantastique. Je crois bien n'avoir jamais vu ça de ma courte vie. Les angles de prise de vue, aussi improbables soient-ils, nous ancrent dans la peau du protagoniste, qui est dans une perpétuelle fuite. Le montage est également assez dingue. Démiurgique, Tsukamoto ne se refuse rien, les plans de 3 secondes s'accumulent. De nombreux effets qui peuvent paraître "cheap" sont utilisés. Ceux ci renforcent le côté très malsain et nerveux du long-métrage. Tetsuo est un peu le petit frère cocaïnomane d'Eraserhead, en un sens.
Événement dans les films cyberpunk, Tetsuo ne m'a pas laissé de marbre. Et si je l'ai comparé à un film de Lynch, ce n'est pas sans raisons. Comme un Lynch, Tetsuo ne doit pas s'intellectualiser lors du visionnage, mais se ressentir. Ressentir le désespoir des personnages, qui nous est étrangement familier. Le film est tout de même assez accessible pour peu que l'on soit un minimum cinéphile, et la trame narrative est assez compréhensible, malgré sa forme peu orthodoxe.
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le 19 juin 2020
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