Je suis allé voir ce film avec un esprit curieux. Franchement dire, j'avais très envie de comprendre pourquoi un tel engouement, aussi bien national que mondial l'entourait et pourquoi Michel Hazanavicius s'est lancé dans cette idée surprenante de nous pondre un film muet.
Au début, j'ai encaissé les premières minutes et tout de suite, j'ai eu ce sentiment de déjà vu, je me suis repassé dans mon esprit ces petites scènes que j'ai très souvent aperçu en zappant ou dans des pubs et pour être honnête, à ce moment là je ne me voyais pas du tout prendre du plaisir à regarder ce film. Je me suis clairement dit qu'il s'agissait d'un délire complexe pour intellectuels en pleine défonce et que ce film ne s'adressait qu'à eux. Comment y voir quelque chose de neuf lorsque l'on a toujours en tête ces films de Chaplin qu'on nous a tant repassé lors de notre enfance, comment ne pas y voir une forme de prétention de vouloir faire quelque chose que l'audience n'attend pas du tout.
C'est évidemment en partant avec tous ces préjugés que l'on se retrouve dans l'erreur. Ce film est en fait un véritable hommage de la part du réalisateur qui a voulu exprimer un besoin visiblement intense de montrer à quel point il a aimé ces films que l'on ne fait plus. Je me suis rendu compte, plus les minutes défilaient que je me sentais à l'aise avec le sujet mais je me suis surtout rendu compte après un certain moment que Michel Hazanavicius avait déjà réussi à éveiller en moi une passion inhérente à mon coeur mais qui est restée trop longtemps enfouie.
Dans un premier temps et il est très important de le souligner, ce film a été réalisé avec un soin assez incroyable. D'un point de vue technique déjà, la lumière est juste parfaite, il n'y a absolument aucun autre mot pour dire à quel point l'image de l'époque est respectée ici. Tous les décors et costumes forment un ensemble cohérent avec l'éclairage utilisé et nous offre un réel plaisir pour les yeux. Esthétiquement oui, le film frise ou atteint la perfection, chacun jugera, mais j'ai véritablement été séduit. L'histoire se déroulait sous mes yeux et je ne ressentait plus que de l'affection. Mon esprit critique et pessimiste s'est dissipé sans même que je ne m'en rende compte et je n'ai pu qu'apprécier comme une madeleine cette histoire d'amour originale.
Et comment évidemment ne pas parler de la prestation des acteurs, ahlala, Duj ! Quel acteur ! On lui avait dit justement un jour que ses mimiques excessives l'empêcheront de trouver du boulot, non pas un défaut de talent, mais tout simplement que personne ne prendrait le risque de lui attribuer des rôles dans lesquels son visage ne correspondrait pas. Ce personnage de Georges Valentin (qui est peut être à ce jour LE rôle de sa vie au cinéma) est un démenti tellement puissant à cela de par la qualité avec laquelle il réussit à le faire évoluer. Tantôt joueur, tantôt sérieux, tantôt rieur, tantôt pleureur, il jongle avec la plupart des sentiments d'une maîtrise que lui seul possède. Je ne me suis jamais senti blasé, je ne l'ai jamais trouvé lourd et réussir l'exploit de nous tenir en haleine sans parler est sans doute ce qui aura contribué à lui faire obtenir le titre suprême.
Je n'oublie pas Bérénice Béjo, car souvent dans certains films il faut un ou une partenaire qui ait ce don de renvoyer avec justesse les émotions et représente beaucoup plus qu'un second rôle dans ce film. Elle joue remarquablement le côté dynamique du personnage de Peppy Miller qui sert admirablement bien la dichotomie du film, quand celle-ci connaît son ascension et que Georges Valentin de son côté déchante à cause de la chute de son gagne-pain.
En conclusion, The Artist est un film qui mérite d'être vu et qu'on s'y attarde car les choses n'ont pas été faites à motiée et c'est même tout le contraire. Même "Uggy" le petit chien du film livre sa petite prestation attendrissante et se fond dans ce film comme s'il manquerait s'il n'y était pas. L'histoire se déroule sous nos yeux sans qu'une seule fois l'on ne décroche, bercés par une musique des plus pertinentes. C'est de l'art, du grand art.