Il y a des films où la forme et le fond coopèrent avec une telle force qu'on se retrouve littéralement transporté dans l'œuvre du début jusqu'à la fin. D'autres, à l'inverse, nous laissent un goût amer, parce que l'on voudrait les apprécier autant pour l'un que pour l'autre mais notre jugement de goût y est définitivement réticent.
Je ne peux pas dire que The Assassin est objectivement un film problématique en ce sens car la forme très contemplative et poétique sied avec le rythme lent et le peu de dialogue du film. Il serait donc injuste d'estimer que The Assassin est raté dans l'exécution du contenu qu'il met en place puisque cet univers peut en séduire plus d'un et semble délibérément voulu pour aller dans ce sens. Néanmoins, je pense être en mesure dans cette critique d'expliquer les raisons pour lesquelles le film ne m'a pas convaincu personnellement car je suis justement quelqu'un ayant tendance à préférer les œuvres aux longs plans-séquence plutôt que les montages tonitruants et dynamiques du cinéma hong-kongais.
Si la note que je lui attribue reste grandement correcte, c'est parce que le film jouit d'une si belle photographie, d'une si belle lumière, d'une si belle mise en scène qu'il est difficile de ne pas se retrouver subjuguer rien que par l'aspect formel. De plus, la dose de mystère qui plane tout au long du film concernant la trame scénaristique peut se montrer plaisante parce que cela permet de créer une atmosphère intrigante et propice au travail de l'interprétation (mais attention, c'est paradoxalement aussi l'un des gros points faibles du film par son côté extrême).
The Assassin me fait donc l'impression d'un exercice de style plutôt osé mais qui peine à transporter le spectateur en tout point. Le principal problème étant cette gestion du mystère, qui est si prononcée que cela va jusqu'à perdre le spectateur dans les différents complots et intrigues dans lesquels se retrouvent prisonniers les personnages. C'est un film avec un fil scénaristique assez indigeste à suivre parce qu'on évoque parfois des personnages que l'on ne verra sur qu'une seule scène, ou encore des personnages que l'on verra ne pas décrocher un seul mot.
Le second problème est alors le traitement des personnages, un traitement qui les rend d'après moi fades et ennuyants. Ils finissent par tous se ressembler plus ou moins dans leur silence et leurs expressions jusqu'à gommer toute spécificité entre eux. On se désintéresse du sort de chacun tant leur potentiel psychologique n'est jamais exploité à la moindre seconde. J'aurais grandement apprécié une exploration plus fine de certaines relations entre les personnages, par exemple celle entre Yinniang et son cousin, ou encore celle entre Yinniang et son mentor mais il n'en est absolument rien, les séquences sont presque toujours décevantes compte tenu des attentes. J'ai l'impression que tout est tellement traité en surface pour ne laisser place qu'à la longueur de chaque plan-séquence que ça en devient simplement lourd à suivre alors que c'était très prometteur dès les premières images.
Reste un plan final assez juste et à l'image du film où la musique et la beauté du paysage avec ce côté vagabond du personne principal, boucle l'œuvre en elle-même sans réellement boucler certaines problématiques exposées au départ.
On ressort un peu frustré de ce que le film nous propose. On comprend les enjeux dans les grandes lignes et les dilemmes moraux qui obsèdent la conscience du protagoniste, mais ces derniers se montrent pas suffisamment exploités pour devenir objets d'intérêt pour le spectateur.
Une petite déception dans la mesure où j'aurais aimé l'apprécier davantage, en particulier lorsqu'on s'attarde sur sa qualité visuelle indéniable.