The Assassin, film de "sabre" du taïwanais Hou Hsiao-Hsien, qui a remporté le prix de mise en scène à Cannes avec une mouture non encore finalisée et non sous-titrée.
Un synopsis: Dans la chine médiévale, sur fond d'intrigues politiques, une femme est chargée d'assassiner son amour de jeunesse.
Un avertissement: ce film n'a rien d'un film de sabre avec multiples combat et beaucoup d'action. C'est même tout le contraire. Si vous n'aimez pas les films contemplatifs, les non actions et que vous avez besoin que des choses se passent ou qu'on vous raconte tout, n'y allez pas, vous vous ennuieriez. Sinon, courez-y.
Courrez y d'abord pour l'incroyable plastique du film. C'est proprement un exceptionnel travail d’orfèvrerie. Un travail sur les couleurs sublime tout en rouge et or. Une magie et une mystique qui se traduit avec intelligence dans les superpositions, les voiles au sens propre et au figuré. Chaque détail des décors, des costumes, des paysage, des mouvements, des postures est travaillé à l'extrême. De sorte que chaque image, chaque cadrage est un tableau et une claque esthétique.
Le tout est soutenu par une bande son d'une efficacité redoutable pour finir d'installer une atmosphère. Mais aussi, vu le peu de dialogues, pour occuper, sans envahir, l'espace auditif.
Le rythme est un subtil mélange de lenteurs et de saccades, donnant au film toute sa puissance hypnotique.
On en arrive au point polémique et à la raison de l’avertissement, le propos. Je peux comprendre qu'on se soit ennuyé, mais je ne partage pas cet avis. Il doit y avoir en tout 5 scènes de combat, toutes durant moins de 2mn. Sur 1h45mn de film, il doit y avoir, au grand maximum 15mn de dialogues. Et pourtant, c'est largement suffisant. Ce peu d'actions, ce peu de dialogues mais tellement parfaitement maîtrisés, minutés, exacts sont efficaces pour créer des personnages - et surtout les personnages féminins - d'une incroyable complexité et d'une grande force. (c'est là qu'on constate le travail titanesque que ce film a dû être, tout calculer pour qu'avec le moins possible on ait le plus possible). Mais aussi pour laisser toute l'histoire se déployer librement, de façon cohérente et consistante. Le spectateur n'est pas passif, buvant ce qu'on lui raconte. Il doit être actif, il doit mobiliser son imagination et interpréter les signes pour faire émerger l'histoire - comme dans la vie en somme. Dis autrement, ce n'est clairement pas un film qui nous prend par la main pour tout nous expliquer, comme c'est la tendance dans le cinéma et les séries depuis quelques temps. Non, ce film donne juste les briques fondamentales et nous laisse libre dans notre interprétation.
Je comprends que ça en déboussole plus d'un. Mais c'est le cinéma que j'aime.