Si The Assassin comporte bien quelques séquences typées Wu xian pian, il se détache pourtant bien de l'idée que l'on peut s'en faire, Hou Hsiao-hsien s'en éloigne et propose une fresque historique et intimiste filmée comme une suite vivante de somptueux tableaux
C'est sur ce dernier point que The Assassin prend une ampleur particulière, s'il est lent et contemplatif, Hou Hsiao-hsien parvient à nous entrainer dans une atmosphère particulière, nous faire vivre les événements se déroulant à l'écran et surtout, faire ressentir les enjeux et les sensations, tant historiques qu'intimistes. L'histoire est simple, elle se situe dans une Chine du VIIIe siècle vivant des tensions internes et l'auteur va suivre l'évolution d'une tueuse retrouvant sa famille, ainsi que les dilemmes qui vont se présenter à elle.
La particularité de The Assassin va justement se trouver ici, malgré une évidente dramaturgie dans sa situation, l'auteur ne cherche pas à créer un attachement à son égard, tout le long il y a une froideur autour d'elle, tant par rapport aux spectateurs que dans les relations qu'elle entretient avec les autres personnages. Elle est fascinante à suivre, et le détachement qu'elle entretient avec les protagonistes (et chacun d'eux trouve sa place dans ces tableaux) accentue cette sensation. Le contexte politique d'une région cherchant à s'éloigner du pouvoir central est aussi passionnant, surtout par la façon dont il est en osmose avec les enjeux de la protagoniste.
Hou Hsiao-hsien joue sur l'économie des mots et des actions, ce qui est nécessaire pour que le spectateurs s'imprègne de l'ambiance, et celle-ci est prenante de bout en bout. Il y a beaucoup de lyrisme, une touche semblant fantastique parfois, l'impression d'être au plus près des décors et de ressentir les particularités des éléments naturels ainsi que ceux d'intérieurs. Le fond de l'œuvre est en alchimie avec la forme, et cette dernière est sublime, accentuant la poésie et se révélant tout simplement époustouflante.
Tout est parfaitement travaillé, la composition des plans, les mouvements de caméra (fluides, avec de parfaits plans-séquences), les rares scènes de combats, la direction d'acteurs ou la bande originale, tout en subtilité. On passe de plans d'intérieurs tout en couleur, où la politique se mêle aux complots, à de sublimes tableaux extérieurs avec une alternance entre soleil et brumes, dans une nature sublimée par la camera d'Hou Hsiao-hsien, créant des compositions simplement magiques et séduisantes.
Avec The Assassin, Hou Hsiao-hsien nous invite dans la Chine du VIIIe siècle, sublimant celle-ci et mêlant les enjeux historiques à ceux intimistes, préférant l'expression de la camera à ceux des mots, avec de magnifiques compositions, un lyrisme traversant l'œuvre et une suite fluide et fascinante de sublimes tableaux.