Quand la Shaw Brothers remake la Shaw Brothers pour rendre hommage à la Shaw Brothers, ça donne The Bare-Footed Kid (1993), remake du film Les Disciples de Shaolin de Chang Cheh, avec Alexander Fu Sheng, sorti en 1975. Mais The Bare-Footed Kid, c’est également une des rares (l’unique ?) incursions de Johnnie To dans le wu xia-pian, raison de plus d’y jeter un œil pour qui apprécie un tant soit peu le réalisateur aux 1001 polars. Pour couronner le tout, c’est Liu Chia Liang qui est aux commandes des chorégraphies, comme pour le film original. Il est à noter que je n’ai d’ailleurs pas vu ce film original, il n’y aura donc aucune comparaison dans cette chronique, le film ayant été pris en tant que tel. Alors, qu’est-ce que ça donne du Johnnie To qui s’amuse à faire parler les sabres plutôt que la poudre ? Eh bien c’était très agréable à regarder.


The Bare-Footed Kid fait partie de cette vague du renouveau du wu xia-pian au début des années 90. The Assassins, Blade of Fury, The Blade, Le Temple du Lotus Rouge, la saga des Il Était une Fois en Chine, L’Auberge du Dragon, la trilogie Swordsman, Evil Cult, … les titres sont nombreux et ont quasiment tous en commun un aspect survitaminé qui ne plaira pas forcément à tous les amateurs de films de sabres old-school des années 70. Presque tous les réalisateurs les plus connus du cinéma de Hong Kong ont tenté leur chance dans le genre et il en est ressorti quelques perles. Johnnie To s’y colle donc lui aussi et réunit pour l’occasion un casting trois étoiles : le tout jeune Aaron Kwok (Cold War, 2000AD), qui commençait à enchainer un paquet de productions, la toujours superbe Maggie Cheung (As Tears go By, In The Mood For Love), la trop rare Wu Chien-Lien (Beyond Hypothermia, Intruder), ou encore les éternels seconds Paul Chun (People’s Hero, Fight Back to School) et Kenneth Tsang (The Killer, Le Syndicat du Crime II). Et comme pour faire le lien avec l’époque à laquelle le film rend hommage, on retrouve également le toujours imposant, par son charisme, Ti Lung (Le Syndicat du Crime, La Rage du Tigre). Le casting de manière générale s’en sort avec les honneurs. Ti Lung, toujours la classe, crève l’écran. Aaron Kwok est un peu moins bon, bien que livrant une prestation malgré tout très correcte, mais se donne à fond dans ce rôle de jeune combattant naïf et fougueux. Kenneth Tsang semble prendre un malin plaisir à jouer un connard fini et que dire de Maggie Cheung, toujours aussi belle. Les personnages qu’ils interprètent sont tous crédibles, mais dommage que les deux personnages féminins soient vraiment sous exploités, même si la relation entre ceux de Maggie Cheung et Ti Lung est très touchante.


Johnnie To nous pond une très chouette reconstitution historique et met en scène une histoire certes classique mais assez forte. Le film adopte un ton léger au début, avec pas mal de touches d’humour, mais plus le film avance, plus on sent qu’il va prendre un ton plus dramatique, plus tragique, jusqu’à être dénué de tout humour dans sa dernière partie. Le côté tragique a bien moins d’impact que dans par exemple Blade of Fury, sorti la même année, avec également Ti Lung, la faute à un scénario qui semble parfois vouloir aller trop vite ou alors à un film auquel il manquerait des bouts. En effet, certains personnages connaissent une évolution trop rapide ou des changements trop abruptes dans leur comportement et cela même si le film prend le temps de poser les bases de ses personnages. Du coup, il est vrai que les combats ne sont pas aussi nombreux qu’on aurait pu l’espérer, mais ils sont par contre de très bonne facture, très vifs, très énergiques. Ça va à cent à l’heure, avec des chorégraphies vraiment réussies, avec un combat de fin relativement violent, même si on aurait aimé avoir un ultime adversaire bien coriace (martialement parlant). C’est frénétique, mais parfois trop frénétique, au point de nuire un peu à la lisibilité des combats. Avec une caméra sans cesse en mouvement et des angles de vue parfois chaotiques, To tente de montrer toute la rage qui est dans le personnage de Aaron Kwok, mais n’est pas Tsui Hark qui veut… De manière générale, c’est la mise en scène de To qui n’a rien exceptionnel. Elle reste bien emballée, plutôt dynamique, avec de très beaux plans, mais elle est très impersonnelle par rapport au style qui, par la suite, lui collera à la peau dans ses polars. A noter une musique très présente, souvent de la canto pop qui convient étonnement bien aux scènes.


The Bare-Footed Kid est clairement un film mineur dans la filmographie de Johnnie To. Néanmoins, on ne s’ennuie pas et on passe même un bon moment devant cette petite bobine méconnue du réalisateur de The Mission et Election.


Critique originale avec images et anecdotes : ICI

cherycok
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le 25 janv. 2021

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