Harmonie, luxe et formats d'images
J'attendais le dernier film de Sofia Coppola avec une certaine attitude. En effet la bande annonce m'avait fait la désagréable sensation d'un « Spring Breakers » à la sauce Coppola. Avant d'aller plus loin dans cette critique, je tiens à préciser que j'aime beaucoup les films de Sofia Coppola (malgré le fait que je n'aie pas vu « Somewhere ») et que j'adore « Lost in Translation ».
Le film The Bling Ring est vraiment bien. On suit les aventures d'une bande de jeunes obsédés par le luxe, les stars et la célébrité. Le groupe va voler chez des peoples divers objets de luxe à des prix mirobolants et fait la fête. Le scénario narre cette histoire, passant du « vivre jeune, à mille à l'heure et mourir » puis le retour à la réalité. Je vais être franc, si pour moi Sofia Coppola est meilleure réalisatrice que son père, elle n'a pas son talent narratif et le scénario arrive vite à être un peu plat. Ce que j'adorais dans sa filmographie, c' était que ses personnages avaient toujours quelque chose à m'apprendre sur l'humain par leur profondeur et leur maturité. Ici les personnages sont infantiles et assez creux. Juste des jeunes superficiels un peu débiles, gavés au fric, à la célébrité et aux signes extérieurs de richesse. Cependant, il est explicite que Sofia Coppola réalise ici une critique assez bien construite de cette jeunesse mais à travers elle des médias et des stars qui en découlent. Je ne m'attarderai pas vraiment sur les acteurs qui livrent une prestation correcte sans être vraiment inoubliable (comme leurs personnages un peu crétins).
Mais c'est là que l'essentiel du film arrive : une réalisation extraordinaire. Oh oui les enfants, la fifille Coppola est vraiment entré dans mon top 10 des réalisateurs contemporains et assure d'y rester avec ce film. Je pourrais parler des heures, citant plan par plan le film. La réalisatrice de « Virgin Suicides » sait pour ses films arriver à l'harmonie parfaite entre fond et forme. C'est selon moi l’essence d'un bon film : une forme au service du fond sans non plus être trop banale. Dans The Bling Ring, la réalisation, le découpage, le montage forment un tout proche de l'histoire tout en restant à un stade d'observation avec des passages admirables où la caméra ne juge pas ces jeunes, les observes juste. Coppola à l'idée de passer par le biais des caméras que ce soient des webcams, des caméras de surveillances, ou encore des smartphones, pour entrer dans le quotidien de ses personnages. Là où la bougresse est forte c'est aussi par ses formats d'images (j'en frissonne presque encore) : elle mélange images basse-définitions d'internet, des photos, des copies d'écrans Facebook, des sms, des reportages tv, etc.... De plus, le format d'image de la caméra est très proche du 16/9 (le même que les tv) si mon oeil est bon. Avec ces formats, elle fait un pied-de-main à Hollywood et ses formes standardisées Cinémascope. Tout s’entremêle, rappelant petit à petit aux spectateurs que la société apporte les outils à ces jeunes, elle les fabrique autant qu'elle les punit et les admire. Je retiens une séquence où le personnage masculin de la bande explique à une journaliste de Vanity Fair que l'Amérique a une fascination perverse pour les Bonnie & Clyde. Sofia Coppola aura aussi ses petits bonbons à nous mettre sous la langue comme ce plan séquence où l'on voit une maison assez richement stylisée sur fond de Los Angeles de nuit. On assiste au cambriolage sans montage, avec seulement une camera qui se rapproche lentement, gardant une vision d'ensemble et n'ayant comme son que le bruit de la ville de nuit. Magique. C'est du cinéma comme je l'aime et comme je veux le vivre, rythmé, beau, réfléchi et harmonieux.
Oui ce film est bon, même si le scénario n'est pas grandiose, il est porté par une réalisation quasiment sans faute. On ne s'ennuie pas, on frissonne, on sourit et même si on se sent distant des personnages, on a un peu la sensation d'être celui qui doit juger leurs actes et leurs vies.