(! AUCUN SPOILER !)
Quatre ans après nous avoir asséné une belle claque avec The Dark Knight, Christopher Nolan nous revient avec pour but de mettre fin à son voyage dans l’univers torturé de Batman.
Difficile dès lors de ne pas songer à ces trilogies, pourtant brillamment entamées, qui se sont terminées de manière décevante au regard des attentes élevées qu’elles suscitaient (l’exemple le plus flagrant étant la saga Spider-Man et son troisième épisode boursouflé).
C’est donc avec plus de fébrilité que d’enthousiasme que la fin de cette épopée s’est faite attendre. Nolan a-t-il bien fait de retourner au charbon après une œuvre aussi aboutie que The Dark Knight ? L’a-t-il égalé, surpassé ou bien a-t-il succombé à la « malédiction » du troisième volet ?
Au final, il s’avère difficile de répondre de manière directe et concise à ces questions tant le film est différent du précédent ; il n’est effectivement plus question d’affrontement psychologique pur dans un thriller noir cassant les codes du mythe super-héroïque mais plutôt d’un duel brutal, d’une plongée au plus profond du désespoir avec pour seul rayon de lumière le Chevalier Noir lui-même, qui n’aura jamais été poussé à ce point dans ses retranchements physiques et moraux.
De cette abîme ne peut renaître que l’espoir sous sa forme la plus pure, la plus viscérale, et c’est dans ces conditions que le parcours initiatique de Bruce Wayne prend une ampleur légendaire, enfin digne du super-héros qu’il doit être. A ce titre, grâce à une multitude de scènes iconiques, cet ultime chapitre est de loin le plus proche du Batman que les fans ont découvert soit dans les comics, soit dans la brillante série animée de 1992 : un homme brisé, flirtant avec les limites humaines pour sans cesse se relever tout en véhiculant de nobles valeurs, le tout avec une classe irradiant l’écran (ou la page) ; aucun doute, l’Homme Chauve-Souris est de retour et c’est précisément ce qui décevra ceux qui adoraient le second volet essentiellement pour son côté polar ou pour le Joker plutôt que pour son héros lui-même, alors relégué au second plan.
Ici, Nolan choisit de nous saisir à la gorge et de nous frapper en plein cœur à de nombreuses reprises, que ce soit directement avec un rythme frénétique et un Bane monstrueux de force et d’ingéniosité, ou par l’intermédiaire des poignantes interprétations de Christian Bale (Bruce), Michael Caine (Alfred) et Joseph Gordon-Levitt (John Blake), mais encore via l’espièglerie de Catwoman, l’excellente surprise du film qui apporte une dose d’humour et de (séduisante !) fraîcheur plus qu’appréciable, merci Anne Hathaway ! Si Gary Oldman (Gordon) et Morgan Freeman (Fox) sont bien sûr impeccables comme à l’accoutumée, nous ne pouvons pas en dire autant de Marion Cotillard (Miranda Tate), qui livre une prestation correcte jusqu’à manquer cruellement de justesse lors de sa toute dernière scène.
L’autre force de cette conclusion est sans conteste sa façon de boucler la boucle ; les allusions aux deux premiers opus sont en effet légion, poursuivant la critique économique et sociale jusqu’à son paroxysme et mettant un point final à la quête de Ra’s al Ghul en passant par les retombées du système inspiré par Harvey Dent à Gotham City, tous les enjeux installés trouvent une finalité, comme pour nous rappeler que le réalisateur britannique en a bel et bien terminé avec sa légende. Un mythe auquel Hans Zimmer aura lui aussi remarquablement contribué avec ses mémorables compositions, jonglant entre l’héroïque, l’anxiogène et le touchant, nul doute que sa partition nous hantera encore maintes années.
Loin du simple baroud d’honneur, Christopher Nolan rejoint grâce à The Dark Knight Rises le cercle très restreint des cinéastes ayant réussi une grande trilogie dans leur carrière. A cela s’ajoute son exploit d’avoir façonné un film mieux rythmé, plus riche, fun, émouvant et surtout batmanesque que les deux précédents. Un délice pour batfans et amateurs de fresques épiques, à consommer sans modération tant il se bonifie avec le temps !
9,5/10