Le monde extérieur est déjà à l'intérieur
Cette critique est pleine de spoils. Il vous faut d'abord le choc électrique de la vision de ce film, du reste très facilement trouvable en HD sur youtube. Partez d'ici ou vous allez tout interpréter dans mon sens.
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Le descriptif du film sur le site du réalisateur est éloquent : "Un jeune garçon apprend le piano..." De fait, tout est construit autour de la psyché de ce jeune garçon maltraité par un père autoritaire, qui lui balance une claque sur la nuque à chaque fois qu'il rate une note, toujours la même. De cette psyché anxieuse et harcelée, émerge un monde noir et tentaculaire à l'esthétique faussement naïve, peuplé des personnages emblématiques de l'enfance des années 80-90 : on apercevra au vol Pikachu, Mario, une référence à Who Framed Roger Rabbit, quelques autres. Le public, souvent bien bizarre dans les salles de projection, rira à la moindre horreur d'humour noir lâchée devant ses yeux. De l'humour noir, tellement noir d'ailleurs que les rires finissent par s'y noyer.
Le court est une attaque virulente contre une société qui se détache peu à peu de tout sentiment authentique, de toute empathie, de tout réel. Qui remplace de façon cynique et hasardeuse ses membres par des idées, des personnages qu'on leur colle dessus, mettant à égalité le vivant et le non-vivant, le réel et le fictif, générant une confusion totale, un pur fantasme.
O'Reilly nous jette au regard le délire haineux d'un encastré dans une société performative et cruelle, qui ne peut s'en sortir, et finir sa composition de piano, qu'en se retournant contre la main qui le frappe. Sans toutefois jamais plus pouvoir se débarrasser des fantômes qu'elle a créés.