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Avec ‘The Fabelmans’, Steven Spielberg réalise un divertissement aussi superbe qu’émouvant, revenant sur son enfance et la naissance de sa vocation de cinéaste. On passe un excellent moment devant ce film de 2h31 qu’on ne sent pas passer. Spielberg signe une vraie réussite, et assurément l’un des films marquant de l’année 2023.


Passionné de cinéma, Sammy Fabelman passe son temps à filmer sa famille. S’il est encouragé dans cette voie par sa mère Mitzi, dotée d’un tempérament artistique, son père Burt, scientifique accompli, considère que sa passion est surtout un passe-temps. Au fil des années, Sammy, à force de pointer sa caméra sur ses parents et ses sœurs, est devenu le documentariste de l’histoire familiale ! Il réalise même de petits films amateurs de plus en plus sophistiqués, interprétés par ses amis et ses sœurs.


Steven Spielberg réalise une sorte d’auto-biopic, revient sur sa jeunesse et son adolescence. On avait pu voir il y a quelques mois le film de James Gray ‘Armageddon Time’ qui reposait sur le même principe. Si James Gray s’attachait à restituer une époque et une amitié interraciale, Spielberg réalise plutôt l’introspection de sa vie et de sa vocation de cinéaste.


Spielberg met très bien en image ce que c’est que l’admiration pour le cinéma. Chaque cinéphile pourra s’y reconnaître. Aimer le cinéma s’est rester scotché à son siège pendant la projection, les yeux ébahis et la bouche entrouverte. Pour Spielberg, son premier choc fut l’accident spectaculaire et remarquablement monté entre une voiture et deux trains dans ‘Sous le plus grand chapiteau du monde’ de Cecil B. DeMille. Le réalisateur américain montre également très bien comment des plans, des séquences de film peuvent vous marquer à jamais. On repense sans cesse à ces images qui vous hantent et dont vous rêvez.


Ce qui très beau et touchant, c’est la manière avec il raconte la naissance de son envie de devenir cinéaste. Cela a commencé par filmer sa famille en voiture ou au camping avec une caméra Super 8. Puis Spielberg a imité, refait les films qu’il a aimé, à commencer par la scène du film de DeMille qui l’a marqué. En voyant les court-métrages réalisés dans le film, on s’amuse à retrouver tout ce qui fait le sel du cinéma de Spielberg. Il y a la passion du spectacle, le goût pour le western et le combats, un intérêt pour la guerre. On pense régulièrement à Indiana Jones ou au soldat Ryan. Les séquences familiales rappellent celles d’E.T. Il est assez poignant de constater que Spielberg, dont on avait l’impression que ces films n’étaient pas tellement personnels, se référait en fait à ses goûts pour l’enfance. Enfin, on constate son goût pour les divertissements de haute tenue et sa défense d’un certain savoir-faire technique.


Le cinéaste américain montre la force que peuvent contenir les images cinématographiques. Elles peuvent vous marquer, donner naissance à une vocation. Mais surtout, elles peuvent vous révéler des choses que vous ne doutiez pas. Dans une séquence bouleversante, le héros redécouvre sa mère grâce à des scènes qu’il a filmé sans se rendre compte de l’importance de ce qu’il captait.


Car on retrouve dans ce film un thème ultra-spielbergien : la famille, et plus particulièrement la famille désunie. Le réalisateur brosse un portrait très émouvant de sa mère, une femme fantasque et dévouée à sa famille mais sans doute dépressive. Elle a des crises de mélancolies, de regret d’une époque paradisiaque. Le relation entre le fils et sa mère est écrite avec une grande justesse. Leur relation est tout d’abord parfaitement pure, le jeune Sammy la regarde avec admiration. Et puis un évènement, une découverte viendra fragiliser cette relation. Le fils sera d’ailleurs d’une grande injustice avec sa mère, comme on peut parfois l’être avec ses parents. Enfin, Spielberg raconte avec pudeur le délitement d’un couple et comment une vie, un mari, une famille ne suffisent plus à rendre une femme heureuse.


Dans le rôle principal, Gabriel LaBelle est une révélation. Il a une palette de jeu large et a surtout un physique étonnant de gringalet. On a ainsi l’impression qu’il n’est jamais à sa place. Paul Dano est parfait comme d’habitude dans le rôle de ce père un peu lâche. Enfin, Michelle Williams est absolument bluffante dans le rôle de cette mère aimante, protectrice mais dépressive. Elle joue aussi bien la folie joyeuse que la tristesse mélancolique. Ajoutons un court mais délicieux caméo de David Lynch en John Ford.


Spielberg a eu bien raison d’attendre d’avoir 76 ans pour réaliser cette œuvre tellement personnelle. C’est une vraie réussite et sans doute son meilleur film. Courrez-y.


Noel_Astoc
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le 23 févr. 2023

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