Après 4 ans nous avoir tétanisé avec l'éprouvant et déchirant Silenced, le FFCP nous donne des nouvelles de son cinéaste Hwang Dong-hyuk (qui a signé un autre film entre temps) pour cette grosse production sorti tout juste sorti en Corée et qui a l'air de bien cartonné sur place. Cela dit, ceux qui s'attendait à un blockbuster gorgés de bataille façon Roaring Curents (aka the Admiral) ont tiré la tronche. Le film mise assez peu sur l'action qui se résument à 3-4 scènes guerrières de quelques minutes (bien fichus cela dit). L'essentiel du film est plutôt centré sur la stratégie, les choix politiques et les jeux d'influences/manipulation. On peut dire qu'on est très loin des titres habituels qui misent à fond sur le nationalisme patriotique et le spectaculaire belliqueux. The fortress en prend même le contre-pied avec de nombreuses séquences qui dévoilent un pouvoir incapable de prendre de bonnes décisions, d'être cohérent, de penser au bien commun et qui préfère s'enfermer dans un cérémoniel pompeux et coupé du bon sens comme ces lettrés qui passent leur temps à demander la mise à mort de ministres en rupture avec la ligne générale de la cour.
The fortress parle ainsi d'une impasse totale dans laquelle se trouve le régent et sa suite face à une situation où tous les choix sont problématiques et risquent de conduire à leur perte même si le respect des codes et coutumes l'emportent souvent sur la logique.
Dans cette optique, les méchants ne sont jamais diabolisés mais campent sur un attentisme pour juger de la suite de leur manœuvre : laisser au roi coréen de faire le premier pas diplomatique ou l'écraser s'il tente une attaque. Mais parmi les officiers de Joseon, le premier pas est considéré comme une humiliation ou une trahison...
Un scénario assez riche et même passionnant mais qui ne passe malheureusement pas le cap de la réalisation plombé par un académisme stérile se limitant à du champ contre-champ mécanique alors qu'il aurait été plus judicieux de confronter les points de vues, les rapports de forces, d'appuyer la lourdeur des réunions, de traduire les confrontations idéologiques. Il en ressort une mise en scène répétitive au possible alors que le scénario ne l'est pas et évoque justement l’absurdité de cette incapacité à décider pour mieux se réfugier dans les beaux discours théoriques plus rassurant. Ca n'excuse pas en revanche les atermoiements qui affaiblissent le dernier acte où plusieurs scènes déclinent le même contenu.
Pour moi, les 140 minutes sont assez bien passés pour la gravité de l'ensemble, son approche résolument non commerciale, la qualité d’interprétation et son scénario qui démonte les coulisses du pouvoir. Mais plusieurs de mes copains ont souffert le martyr.