J’ignore encore aujourd’hui pourquoi je suis allé voir ‘The Gray Man’, film Netflix sorti au cinéma en Belgique. Je crois que le pitch me plaisait. Il y’avait la CIA, des tueurs à gages. Je m’étais sans doute dit que je verrai un thriller ou un film d’espionnage crépusculaire. Mais j’avais omis de vérifier qui réalisait le film. Ce sont les frères Russo, réalisateurs de plusieurs Avengers. Si j’avais été plus attentif au film, je l’aurais soigneusement évité car rien ne m’a plus dans ce film boursouflé, ennuyeux et interminable.
Gray Man est le nom de code de l’agent de la CIA Sierra Six. Recruté dans une prison fédérale par son officier traitant, Donald Fitzroy, Gentry était autrefois un redoutable tueur à gages à la solde de la CIA. Mais la situation a radicalement changé : Gentry est désormais la cible de Lloyd Hansen, ancien comparse de la CIA, totalement déterminé à le traquer à travers le monde pour l’éliminer. L’agent Dani Miranda le couvre – et il en aura besoin.
Ce qui frappe à première vue, c’est franchement la laideur de l’image qui n’est qu’un flot ininterrompu de plans agencés par montage mitraillette. Ca pique les yeux. Mais surtout le film est plombé par une surenchère sans fin d’effets spéciaux. On sent que quasiment tout a été filmé sur fond vert. Les séquences s’enchainent dans une ambiance très noire voir grisâtre. Les scènes d’actions sont ratées et totalement improbables. Notamment, celles tournées à Vienne qui est inepte. Il faut souligner que le film est un plaidoyer de l’Espace Schengen. C’est très étrange. Car même si l’agent ‘Sierra Six’ est poursuivi par de dangereux tueurs, il circule facilement entre la République tchèque, l’Autriche, la Croatie (ou Slovénie, je ne sais plus). Pour revenir aux scènes d’action, elles sont mal montées et empesées par les moyens colossaux qu’ont eu les frères Russo. Ca castagne dans tous les sens, ca tire des rafales toutes les microsecondes. Les scènes d’actions de la saga Mission Impossible sont autrement plus réussies. Il n’y a qu’une séquence réussie, celle dans la boîte de nuit thaïlandaise pendant le nouvel an, où la il y a de l’ambiance, du suspens. Mais sinon, le reste des scènes est raté.
Mais ‘The Gray Man’ est, avant d’être un film d’action, un film d’espionnage. Mais vraiment de l’espionnage de pacotille. On est ni chez John le Carré, ni chez Ben Macintyre dont la complexité et la subtilité des intrigues étaient passionnante. Ici, tout est ultra-lisible, ultra-prévisible. Il y avait pourtant une bonne idée de départ. L’agence d’espionnage (ici la CIA) est présentée comme un fruit pourri, rongée par le mal. Il semblerait que ce soit la nouvelle mode des divertissements d’espionnage hollywoodiens actuellement, si l’on se souvient de ‘The 355’ de Simon Kinsberg (autre nanard d’action/d’espionnage mais cette fois au féminin). Dans ce film, la CIA ne vaut pas mieux qu’une organisation terroriste et devient le tueur. Mais hélas, les frères-réalisateurs n’en font rien, de cette intrigue. Car le film n’a aucune profondeur, réflexion sur ce que deviennent ces organisations de renseignements. Mais cela est symptomatique de l’industrie Hollywoodienne qui ne cherche plus à épaissir ses films mais à simplement produire des films ‘zéro-neurone’ qui n’ont pour mission que de divertir, à condition bien sûr qu’on y adhère. Il y a pourtant quelques perles mais trop rares comme les Missions Impossibles ou Top Gun.
Question casting, la production a eu la plus mauvaise de l’histoire du casting cinématographique. Donner le rôle principal à Ryan Gosling. Certes, l’acteur est beau comme un Dieu, gaulé comme une statue. Mais il est surtout terne, transparent. Il n’a aucune expressivité. Face à lui, Chris Pratt est absolument inexistant. Seule la pétillante Ana de Armas a un peu de charme. Elle sauvait d’ailleurs le dernier mauvais James Bond, lors de la séquence du film à Cuba. Mais tout le monde à part elle est épouvantablement mauvais.
Le film est donc une catastrophe absolue, tant il est bâclé et laid. Pour les films d’espionnages et d’action, mieux vaut revoir les ‘Mission Impossible’. Pour voir un espion traqué par l’organisation qui l’a créé, il faut revoir les saisons 3 et 4 du ‘Bureau des Légendes’. Et pour voir une agence d’espionnage moribonde, mieux vaut revoir ‘Un homme très recherché’ d’Anton Corbijn, qui se révèle être en plus le dernier film dans lequel joue Philip Seymour Hoffman. Mais il vaut mieux éviter de s’infliger cette purge absolue.