A l'origine, celui que l'on nomme le Frelon Vert dans nos contrées est issu d'une émission de radio créée par George W Trendle et Fran Striker en 1936. Soit un spin-off de The Lone Ranger (1933), puisque Britt Reid est le neveu du ranger. Si ce dernier était épaulé par l'amérindien Tonto, le Frelon est secondé par l'asiatique Kato. Après la radio, le Frelon devient la star de serials dans les 40's, puis à la télévision avec Van Williams et Bruce Lee. Si la série (1966-67) est encore très populaire aujourd'hui grâce à la présence de l'acteur d'Opération dragon, elle reste à l'antenne le temps d'une saison de 26 épisodes, malgré un crossover avec la série Batman avec Adam West (1966-68).
Quand Michel Gondry obtient définitivement le poste de réalisateur sur la production de l'adaptation cinématographique, elle patine depuis presque vingt ans. Universal achète les droits en 1992. Il est question d'Eddie Murphy en rôle titre, puis de George Clooney en plein boom d'Urgences (1994-2009). Gondry arrive sur le projet en 1997. Il n'est alors que clippeur émérite et se voit associé au scénariste Edward Neumeier (Robocop, Starship Troopers). Mark Wahlberg en pleine transition d'acteur se retrouve en rôle principal, mais le projet s'arrête. Christopher McQuarrie signe un nouveau script avec Jet Li en Kato.
Voyant que rien n'avance, Universal se désiste, laissant la place à Miramax. Kevin Smith est alors choisi pour le réaliser, mais il laisse vite tomber bien que son script a fini en comic-book en 2010. Soit une histoire mettant en scène les enfants de Reid et Kato. Le producteur de Fast and furious Neal H Moritz récupère les droits en 2007 avec Sony comme partenaire. Seth Rogen devient alors le Frelon Vert et s'implique dans le projet, au point de le coécrire avec son camarade Evan Goldberg. Stephen Chow devait initialement incarner Kato et même réaliser le film durant un temps, mais il quitte le projet pour différends artistiques. Il sera remplacé par Jay Chou, vu dans La cité interdite (Zhang Yimou, 2006).
Gondry revient finalement sur le projet qu'il a laissé plus d'une décennie auparavant pour faire plaisir à son fils. Si le réalisateur se retrouve sur un projet qu'il n'a pas chapeauté dès le départ, en revanche il s'avère ferme sur certains points. Ainsi, il dégage Nicolas Cage qui voulait à tout prix jouer un méchant avec un accent jamaïcain et le remplace par Christoph Waltz.
Gondry travaille à Hollywood depuis le début des 2000's, mais c'était avant tout sur des petits films. La preuve avec Be kind rewind (2008) qui a coûté 20 millions de dollars. En comparaison, The Green Hornet coûte 120 millions (dont au moins 10 millions pour une conversion 3D oubliable). Mercenaire yes man le Michel ? Pas vraiment. Si le côté bricolé et absurde habituel de son cinéma n'est pas vraiment présent (à part peut-être pour les inventions de Kato), en revanche, le réalisateur se fait plaisir sur la mise en scène. On pense notamment à la première scène de baston du film, où le réalisateur multiplie les trouvailles visuelles avec des assaillants partant dans des décors qui s'allongent, des ralentis classes et des objets identifiés permettant à Kato d'anticiper les coups. De même, les poursuites et fusillades sont globalement bien filmées et montées et font que The Green Hornet est un film particulièrement fun.
Alors oui il faut parfois adhérer à l'humour de Seth Rogen. Jay Chou n'a pas le charisme de Bruce Lee. Christoph Waltz joue un méchant qui manque peut-être de personnalité (là où le jamaïcain Nic Cage en aurait surement donné à l'antagoniste). Oui le film joue sur les rouages habituels du duo mal assorti s'entraidant face à un adversaire redoutable, malgré leurs embrouilles communes et The Lone Ranger (Gore Verbinski, 2013) s'en sort mieux là-dessus. Oui Cameron Diaz ne sert malheureusement pas à grand chose dans l'intrigue (une secrétaire love interrest pour le duo) et ne devient réellement utile que dans la dernière bobine.
Mais dans l'ensemble, The Green Hornet est une grosse production attachante, agréable à regarder et qui délivre la marchandise. D'autant que fait agréable, il se suffit à lui-même et même s'il aurait eu une suite, il avait une structure claire avec début-milieu-fin. Ce qui dans le Hollywood actuel des univers lancés dès le premier film (alors qu'il n'est pas sûr de marcher au box-office) est un peu trop rare. C'est peut-être ça aussi qui fait de The Green Hornet un film plaisant se revoyant sans déplaisir.
Malheureusement, après un long development hell et une sortie reportée plusieurs fois, The Green Hornet n'a rapporté que 227 millions de dollars de recettes, dont seulement 98 millions aux USA. Un constat qui se confirmera avec les scores du film de Gore Verbinski adaptant l'émission radio de base deux ans plus tard. Si ce dernier est un peu mieux considéré aujourd'hui, cela ne semble pas vraiment le cas du film de Gondry et c'est assez dommage. Est-ce que ces héros sont passés de mode et n'intéressent pas assez les jeunes d'aujourd'hui, même à grands coups d'effets-spéciaux et de scènes spectaculaires ? Peut-être. En attendant, le Frelon Vert est reparti pour un tour avec le scénariste David Koepp et Universal. A voir si cela se concrétise.