Certains films sont comme de vieux grimoires découverts au fond du grenier, à la fois inattendus, surprenants, quelques peu poussiéreux mais riches. The Hit réalisé par Stephen Frears fait parti de ces objets pêchés avec surprise sans que quiconque n’ait pu m’appâter par un conseil avisé ou attiser ma curiosité. Pas de conseil hormis Mary-X Distribution qui défend vaillamment son film auprès des exploitants pour la future ressortie en salles le 8 juillet prochain.
Quel meilleur argument que s’appuyer sur Christopher Nolan qui intègre dans sa liste des films les plus influents sur son cinéma The Hit. L’argument d’autorité revenant à utiliser le mythique nom de Nolan ne suffit pourtant pas à compléter ma critique pour vous donner envie de découvrir ce polar qui a des vrais airs de road-movie. Avant de se lancer sur le bitume espagnol en direction de Paris, le réalisateur plante deux premières scènes, celle de générique montrant des paysages majestueux sur une musique d’Eric Clapton et celle d’ouverture qui revient dix ans en arrière pour apposer les enjeux du scénario : un repenti dénonce ses complices d’un braquage devant les juges. Une fois son témoignage clôt, ses anciens camardes d’infortunes entonnent à l’unisson « Nous nous retrouverons, je ne sais pas où, je ne sais pas quand, mais je sais que nous nous reverrons un jour ensoleillé. » Noir. Ellipse. Musique de Paco de Lucia. Espagne. Dix ans plus tard.
En opérant une telle ellipse, sans jamais craindre l’incompréhension du spectateur, Stephen Frears nous montre un Willie Parker, plus âgé et plus apaisé, comme s’il était préparé à ce que la rengaine vengeresse de ses anciens camarades viennent bientôt frapper à sa porte. Dans un jeu subtil de tromperie, alors que Willie Parker a déjà connu une transformation physique durant ces dix longues années d’introspection c’est Braddock qui sera finalement le personnage principal. En effet, attirant peu à peu la caméra à son corps, c’est lui qui fera face à des conflits et qui évoluera. Braddock est un professionnel expérimenté qui est chargé de capturer Parker et de le rapatrier à Paris. Dans ce labeur, son second appelé Myron et merveilleusement interprété par Tim Roth (qui signe ici son premier rôle au cinéma avant de contribuer à la gloire de Tarantino) est le reflet en négatif de Willie Parker : fougueux, bagarreur et fortement influençable. Dans cette aventure rocambolesque dans laquelle s’insère une femme au caractère bien trempée, l’humour anglais et les situations cocasses qui en découlent fonctionnent à merveille. À mesure que les kilomètres sont avalés par les différentes voitures dans lesquelles ils posent leur cul, les personnages évoluent mais c’est surtout Braddock qui vit un véritable voyage métaphysique, coincé entre la spiritualité du vieux sage Willie Parker et celle de la nouvelle vague de brigands incarnant le renouveau avec Myron.
The Hit est un film qui a lancé la carrière cinématographique de Stephen Frears dont l’importance et la qualité méritent amplement d’être partagées !
Critique illustrée sur mon site : https://lestylodetoto.wordpress.com/2020/06/25/the-hit-miroir-de-nos-peines/