Film fondateur du cinéma sud-coréen, "La servante" aura donné lieu à une relecture cinquante ans plus tard par Im Sang-Soo, cinéaste remarqué entre autre pour son incroyable "The President's last bang", délaissant la fable moralisatrice à destination des maris infidèles qu'était l'oeuvre originale pour un torpillage en règle de la bourgeoisie coréenne.
Tout en conservant le même point de départ (la relation torride et masochiste entre un riche homme d'affaire et son employée de maison), Im Sang-Soo fait le choix de s'éloigner du matériau d'origine, de le détourner presque, inversant légèrement les rôles en faisant de son héroïne non plus une Glenn Close psychotique avant l'heure mais bien la victime (consentante) de la riche famille.
Le cinéaste tourne ainsi le dos au thriller domestique pour se laisser aller à une violente lutte des classes où l'homme n'est finalement réduit qu'à une présence furtive mais dont le comportement déplorable aura d'énormes répercussions sur son entourage féminin, où l'employé(e) n'est qu'un instrument dont disposent les touts puissants comme ils le souhaitent, le triturant comme une poupée de chiffon que l'on jette après usage.
Une réflexion sur le pouvoir et la soumission qui donne lieu à une poignée de séquences sulfureuses à l'érotisme explicite et qui constitue le meilleur d'un film dont l'intérêt retombe bien vite malgré son approche intéressante, Im Sang-Soo, malgré un sens visuel indéniable et une mise en scène élégante, enfonçant des portes grandes ouvertes avec le doigté d'un wookie et n'accouchant que d'une nouvelle version qui a certes le mérite de ne pas se borner à recopier l'original mais qui ne s'imposait finalement pas.