Désolé Mr Scorsese, je n'ai pas accroché, je m'en excuse. Déjà, cela commence avec quelques plans sur une maison de retraite médicalisée, ce qui annonce clairement la couleur, et puis Al Pacino, Harvey Keitel, Joe Pesci et Robert De Niro font ce qu'ils peuvent, on regrette le temps des années 70 ou 80. Octogénaires pour certains, ils n'ont plus la hargne d'antan, donnant même parfois l'impression de s'auto-caricaturer. Pourtant, je m'étais habitué à voir des Stallone, Eastwood ou Harrison Ford refuser d'abdiquer dans des comebacks improbables ou ridicules, mais cette époque bénite semble malheureusement révolue. Le film est beau, la photographie séduisante, mais je ne suis pas rentré dans l'histoire, peut-être du fait que sur Netflix, on est potentiellement distrait par l'environnement, faire autre chose en même temps, la possibilité de zapper dès que l'ennui s'installe, à l'inverse d'une salle obscure. Ces monstres du cinéma accusent le coup, c'est leur dernier baroud d'honneur, respect pour leur carrière respective au passage. Il souffle comme un vent morose sur Hollywood où toute une génération d'acteurs pourrait bientôt nous quitter...
Mais peut-être que j'en demandais trop, ou que je ne suis simplement pas réceptif à l'essence de l'oeuvre. Réunir De Niro et Al Pacino m'évoque immédiatement Heat de Michael Mann, et là, je suis face à un Scorsese nostalgique qui joue avec le numérique pour gommer les ravages du temps. Beaucoup de scènes rétros m'ont paru factices et la narration confuse, les expressions faciales de notre trio parfois aussi figées que les statues du musée Grévin. The Irishman ou ce sentiment de voir des acteurs cultes qui ne jouent plus, mais radotent comme de vieux couples, Pesci marmonant tel un vieil automate auquel on a remis des piles et Al Pacino qui braille en pyjama et partage sa chambre avec De Niro. J'admets qu'il y a malgré tout de bons moments, notamment lorsque Frank Sheeran, en mode 'Nettoyeur,' se débarrasse des importuns avec une efficacité certaine...
Mes excuses, encore une fois, mais après avoir revu Taxi Driver récemment, où l'on sentait la fougue, l'inspiration, la virulence, et avoir été porté par la Hype du Joker, j'adhère beaucoup moins à cette vision crépusculaire de 3h29 tout de même... De là à imaginer que De Niro termine sa carrière sur un coup de théatre, le corps criblé des balles de Phoenix, pourquoi pas, mais le grand maître en a décidé autrement, il emporte ses personnages et acteurs fétiches avec lui, dans la décrépitude. Bref, je m'en vais faire un rattrapage avec Casino que j'avais loupé et, peut être, je redonnerais une chance à ce film, car je vois déjà les inconditionnels de Scorsese m'attendre au tournant...