The Last Farm
7.2
The Last Farm

Court-métrage de Rúnar Rúnarsson (2004)

Film court -17minutes-, mais superbe, simple, beau, profondément émouvant. La dernière ferme du titre est une masure isolée aux confins du monde, accrochée à la pente qui la domine, en bordure d’un fjord islandais, paysage désolé, rude, âpre, minéral. On est ici au bout de tout : de la terre, de la civilisation, d’une époque révolue, de la vie.


Le film débute par un panoramique, une montagne, l’horizon de la mer grise, une grève de galets au pied d’une falaise. Un vieil homme y ramasse des morceaux de bois rejetés par la mer. Il vit avec sa femme dans cette ferme sur la côte rocheuse, et coupe des planches de bois, apparemment pour protéger sa maison contre l'hiver à venir. Hrafn et Groa sont censés quitter leur ferme isolée pour une maison de retraite en ville. C’est ce qu’on apprendra des rares dialogues du film, avec sa fille au téléphone et plus tard avec le facteur lui apportant son courrier.
Mais il ne faut pas en dire plus du récit, simple, sobre. Le scénario est minimal mais le développement du personnage principal est remarquablement réalisé. Avec peu de mots, mais une mise en scène faite de petits détails et une interprétation qui disent tout de cet homme, Indépendant, fier, attaché à ce bout du monde solitaire.
Il est porté par Sigurður Skúlason, acteur de 82 ans. L’homme est concentré, grave, déterminé dans son activité malgré son âge et la fatigue. Il fait corps avec son environnement où il a passé sa vie à entretenir sa terre, en a la même rudesse, la même rusticité. Par son portrait et le récit de son projet, ce film traversé de pathétique et d'émotion pose un regard déchirant sur le vieillissement et traite la mort avec dignité et tendresse.
Ainsi de ce plan admirable où le vieil homme, avant de partir s’emplit, d’un regard circulaire empreint de contemplation mélancolique des paysages de sa vie, des lieux où il a vécu : les montagnes qui l’ont dominé, le ciel, la mer qui l’a nourrit, sa ferme. Dans ce regard panoramique sur ce paysage aride passe toute une vie de labeur, de joies, de peines et d'amour de sa femme. Et l'impossibilité de la fin de vie proposée en maison de retraite aseptisée. C’est d’une beauté poignante, tout comme le geste de tendresse poétique qu'il dessine auprès de sa femme. Des plans qui perdurent longtemps dans l’esprit.


La beauté visuelle s’accompagne d’une excellente musique délicate et minimaliste -violons, violoncelle- signée Kjartan Sveinsson, membre du groupe islandais Sigur Rós de 1997 à 2013.


https://kjartansveinsson.bandcamp.com/album/the-last-farm


Le film est- disponible en bonus du DVD « Sparrows » ou sur YouTube
https://www.youtube.com/watch?v=Oh7sQ4hPnyk

Créée

le 9 janv. 2021

Critique lue 234 fois

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kinophil

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