(ultra) Light my fire
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le 18 déc. 2019
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The Lighthouse est le second long métrage de Robert Eggers après l'excellent The Witch sorti en 2016. J'avais énormément apprécié The Witch notamment pour son atmosphère anxiogène extrêmement efficace et sa mise en scène ambitieuse. J'avais alors beaucoup d'attentes pour The Lighthouse, et au final, bien qu'ayant plutôt aimé ce film, je pense avoir placé mes attentes un peu trop hautes.
L'histoire prend place sur une île où un gardien de phare et son nouvel assistant vont devoir cohabiter un certain temps tout en entretenant un phare mystérieux.
Je vais, pour cette critique, tout d'abord expliquer les aspects du film qui m'ont plus puis les aspects qui m'ont déplus.
Selon moi la plus grande qualité du film et ce qui en fait un métrage mémorable ce sont les performances impressionnantes de Robert Pattinson et Willem Dafoe. Le film reposant presque entièrement sur leur 2 personnages, une telle performance était donc nécessaire à sa réussite. Willem Dafoe est excellent encore une fois dans son rôle, incarnant ici un vieil homme superstitieux et ingrat nommé Thomas Wake. Robert Pattinson nous livre également une très bonne interprétation du jeune Ephraim Winslow et fait étalage de son talent bien trop négligé jusque là. Je suis donc rassuré concernant son future rôle dans The Batman après sa très médiocre performance dans The King qui m'avait légèrement fait douter de sa capacité à incarner des rôles de cette envergure.
Le film alterne subtilement les moments de silence, de tension, de franche camaraderie, de désolation et même parfois de séduction que partagent les deux personnages. La folie ambiante qui caractérise ce film est également un point positif. On assiste à une véritable dégénérescence mentale des deux protagonistes. En effet les brèves scènes de querelles virent peu à peu à l'hystérie totale alimentée par l'isolement et la consommation monumentale d'alcool de chacun des deux personnages. Frôlant parfois le grotesque, le film arrive à installer cette ambiance surréaliste qui m'a captivé jusqu'à la dernière scène.
La mise en scène ajoute beaucoup à cette ambiance. Personnellement, je crois que le choix du cadre et du noir et blanc correspond à un hommage aux films des années 20 (Nosferatu par exemple). Cependant, par delà l'hommage, ce choix de mise en scène rend le film d'autant plus atypique et lui donne une certaine aura.
Malgré ses qualités indéniables je trouve que le films possède quelques inconvénients majeurs qui m'empêchent de le projeter au rang d'excellent film.
Tout d'abord, le métrage est très imagé et ses idées sont très brouillons. Le fait qu'il soit imagé et qu'il force à une analyse poussée pendant et après le visionnage est loin d'être une mauvaise chose en soi, (un très bon exemple: Enemy de Denis Villeneuve ou encore Mother de Darren Aronofsky ) cependant je trouve que le film se perd dans ses références. En effet le réalisateur se serait inspiré de nombreux mythes et légendes dont celle de Prométhée (ici Eiphram) et Protée (ici Thomas), la boîte de Pandore, ou encore certaines légendes lovecraftiennes. Cependant quel(s) message(s) est on censé en tirer?
Pour ma part je vois ce film comme une illustration du trouble de l'identité et de la cohabitation forcée, chacun des deux protagonistes se mentant l'un à l'autre au sujet de leur passé et de leur identité, mensonges et conspirations qui les amèneront à une confrontation fatale en fin de film. Concernant les images et métaphores, de mon point de vue la sirène représente l'affection (surtout charnelle) dont manque Eiphram sur cette Île, le Triton est une vision mystique qu'Eiphram se fait de Thomas, la lumière représente le savoir absolu que nul ne peut appréhender mais que chacun désir.
Cette interprétation peut encore évoluer cependant il est difficile pour moi de raccorder chacun des éléments et métaphores de ce film à un ensemble cohérent.
Ce qui me tracasse également, c'est l'immensité du champ d'interprétation qui nous est proposé. Pourtant j'adore quand un réalisateur laisse une part d'interprétation à son récit (par exemple la fin de Layer Cake) mais ici on a du mal à faire la part des choses et à se faire une idée globale d'où le récit veut nous emmener.
Thomas et Eipram sont-ils les mêmes personnes ? Qu'y avait-il dans la lumière? Eiphram est-il mort du fait de la malédiction de Thomas? La Sirène était elle un charme ou une hallucination due à l'alcool ? Tant d'interrogations qui resteront sans réponses, libre à l'interprétation.
Pour moi, contrairement à Mother ou Enemy, le film ne sait pas trop quelle direction prendre et se rapproche d'une certaine manière du Film Nemesis, me laissant une impression similaire au final (bien que la fin de Nemesis m'avait frustré au plus haut point). Je suis peut être (sûrement) passé à côté de quelque chose mais cette conclusion est loin d'être hâtive.
Pour finir, je dirais que l'atmosphère générale du film ne m'a pas marqué plus que ça. Pourtant j'en attendais beaucoup de ce point de vue là après The Witch, mais le ton est ici radicalement différent de celui d'un film d'horreur classique. Malgré son esthétique appuyée et ses musiques stridentes j'ai eu du mal à ressentir un réel stress durant le visionnage. Je l'accepte mais malheureusement le film ne me marquera pas autant que je l'aurai souhaité.
En somme, The Lighthouse est un bon film qui vaut la peine d'être vu rien que pour la performance époustouflante de ses acteurs mais qui manque de clarté dans ses idées et ses métaphores.
Créée
le 3 mai 2020
Critique lue 518 fois
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