1947, Angleterre. Dr Faraday, modeste médecin de campagne, est appelé au chevet d'une domestique à Hundreds Hall, vaste demeure d'une famille à la fortune déclinante. Il connaît cet endroit, sa mère y ayant été servante. Il devient ami de la famille. Mais d'étranges phénomènes se produisent dans la bâtisse.
Dans la lignée d'un Crimson Peak ou de l'Orphelinat, The Little Stranger nous plonge donc un vieux manoir dans un univers paranormal. Le film propose ainsi de magnifiques décors pour un quasi huis clos. La très grande majorité des scènes se passent dans une des pièces de la demeure. Le travail sur les lumières est intéressant, notamment certaines scènes de surexposition semblant souligner la fascination, la découverte.
Globalement le réalisateur sait ce qu'il fait, et bien qu'il n'ait pas forcément une patte très marquée, il s'amuse beaucoup des différentes profondeurs de champs. L'image baigne dans une perpétuelle sous-saturation des couleurs, donnant un côté vieilli au film.
Cet aspect ancien pourtant bien à propos, et l'absence de bande son sur certaines scènes, font néanmoins apparaître quelques longueurs. Certes volontairement, des plans s'étirent dans la durée, et ce rythme lent ne plaira pas à tout le monde. Mais il faut reconnaître qu'il prépare merveilleusement bien le terrain à d'autres scènes plus "choc" à la fréquence bien dosée.
Car le film flotte toujours entre deux eaux. On n'est jamais tout à fait certain du caractère paranormal des événements, et tout le monde n'interprétera pas les images de la même manière. Ce doute assumé est appréciable, et laisser des indices ici et là pour la thèse rationnelle et la thèse paranormale à la fois démontre un travail d'écriture plutôt méticuleux.
Cet équilibre est aussi en partie dû au jeu de Domnhall Gleeson, qui parvient à camper un médecin froid dont la détestabilité évolue avec le scénario. Charlotte Rampling est toujours la définition du mot "charisme" dans le petit Larousse. Dommage que le jeu de Ruth Wilson, bien que juste, semble si peu personnel.
Un bon film, donc, avec quelques longueurs mais de vrais moments de tension également. Après What Richard Did, plus grand succès commercial en Irlande en 2012, et Room, Lenny Abrahamson signe un long métrage bien réalisé et qui tient en haleine.