On ne le répétera jamais assez : pour faire un bon film d'épouvante, il faut d'abord trouver l'objet sur lequel focaliser les angoisses des spectateurs. En devenant THE MIRROR pour sa sortie française, le sympathique OCULUS trahit déjà quel sera l'objet choisi pour attirer et catalyser autant de fascinations que de répulsions sur sa surface réfléchissante. Nous suivons donc ici le combat de Kaylie pour innocenter son frère Tim, et prouver que la mort de ses parents fut en réalité l'oeuvre d'un miroir maléfique, capable de manipuler l'esprit humain. Si l'idée du miroir comme forme abstraite d'une entité démoniaque n'est pas vraiment originale, puisque déjà exploitée dans les années 2000 par Black Mirror et son remake indirect Mirrors, elle garantit tout de même un potentiel de vertiges psychologiques exigeant une mise en scène subtile et débarrassée de visuels gores tape-à-l’œil. C'est cette optique que semble avoir choisi Mike Flanagan son créateur, en misant sur les tensions que subissent ces deux protagonistes; mais hélas les sorties de route sont nombreuses, et malgré ces soubresauts d'horreur putassier, le film ne fait jamais vraiment peur.


L'ennui avec THE MIRROR, c'est que c'est un film inégal, bancal, mélange mal amalgamé de bons et de mauvais éléments, dans chaque composantes principales, du scénario à la direction d'acteur en passant par le traitement de l'épouvante, comme si Flanagan ne trouvait l'inspiration et la rigueur nécessaires à son projet que de manière épisodique; un jour avec, un jour sans. D'ailleurs dès le début du film quelque chose semble dissoner dans le jeu d'acteurs, dont la plupart a surtout officié à la télévision. Tantôt en sous-jeu, tantôt en sur-jeu, les variations de tensions et de fragilité qui torturent leur personnage leur donne du fil à retordre. Dans cette première partie, seule Karen Gillan réussit à mettre son charisme particulier, mélange désarmant entre étrangeté et maladresse, au service de son personnage Kaylie, qui parait de plus en plus inquiétant aux vues de son obsession pour le miroir. Cette proposition de protagoniste aux antipodes de l'habituelle gourdasse en détresse, dont le regard et le comportement vous met presque autant mal-à-l'aise que l'objet maléfique, est sans doute la meilleure idée du film. Elle provoque un flux et un reflux d'empathie au point qu'on ne sait plus qui croire, elle ou son frère Tim plus rationnel et plus décidé à tourner la page de leur traumatisme d'enfance.



"Un film d'horreur divertissant à défaut d'être effrayant"



Après cette phase d'exposition, tout le dispositif qui suit sert d'ailleurs qu'à confronter leurs visions opposées du passé et du paranormal. Il s'agit d'un dispositif vu et revu ces dix derniers années, par lequel Kaylie truffe la maison familial de caméra et d'écrans de contrôle pour prouver la présence de forces démoniaques. Ici le barnum technologique a le mérite de rester suffisamment discret pour ne pas captiver toute la mise en scène et laisser s'installer l’intérêt principal de la seconde partie du film, à savoir les phénomènes d'apparitions ou d'hallucinations qui replongeront nos héros dans leur passé. Si la superposition de deux époques par un jeu habile de montage n'est pas non plus totalement originale, elle est ici parfaitement maîtrisée et permet de belles modulations dans la narration à mesure que la ligne temporelle semble se déformer.


Mais ceux qui auront vu et aimé le remarquable Abandonnée de Nacho Cerda, seront comme moi déçus de découvrir qu'un même traitement de l'espace-temps et du traumatisme dans l'enfance mène au même dénouement et à la même moralité concernant le passé. Le film aurait ainsi gagné à progresser davantage dans les possibilités que lui offrait son concept; le principe du miroir maléfique est prétexte à un jeu sur ce que l'on voit, que l'on croit voir, que l'on pense être réalité ou au contraire illusions, il propose ainsi toutes les apparitions spectrales et hallucinations de rigueur; et une fois le contrat rempli, rideau. À n'en pas douter, certains spectateurs seront satisfaits du spectacle, d'autres comme moi regretteront que son auteur n'ait pas pensé à d'autres indices, d'autres pièges ou du moins tentatives par lesquelles nos héros auraient pu continuer leur lutte contre l’insaisissable menace.


critique par ARKHAM pour Le Blog du Cinéma

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le 29 avr. 2015

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