Le manoir aux alouettes
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Après le très réussi premier essai Martha Marcy May Marlene, Sean Durkin poursuit son exploration des psychologies tourmentées dans un récit qui questionne encore le phénomène de l’emprise. Au sujet des sectes répond ici celui, plus ténu et moins romanesque, de la réussite, et du leurre par lequel on indexerait la fortune et le paraitre sur l’accomplissement individuel.
Situé dans les années 80, le récit pourrait être perçu comme une réactualisation des Noces Rebelles, à la différence près que la morale ou le regard de la communauté n’aurait plus d’importance. Le parcours de Rory, revenu dans son Angleterre natale après avoir fait fortune aux Etats-Unis, est celui d’une fuite en avant qui trouve sa toxicité parfaite dans la haute finance, où l’on ne gagne que pour réinvestir, dans l’attente d’un gros coup qui ne cesse de se dérober sur la ligne d’horizon.
Toute l’exposition fonctionne donc sur la construction d’un nouveau départ, et la manière dont le personnage, superbement incarné par Jude Law, fonde un mythe exigé par le milieu dans lequel il gravite. L’investissement se fait donc dans l’apparence, et l’esthétique soignée du film joue bien de cette tension entre le prestige (un manoir gigantesque, des soirées mondaines, un train de vie ostentatoire) et l’angoisse croissante de voir les vides prendre toute la place, que ce soit dans cette maison trop froide ou des constructions qui restent inachevées.
(Spoils à venir)
Il ne reste évidemment qu’à attendre la catastrophe, et le récit prendra soin de l’illustrer assez didactiquement pour tous les éléments exposés, faisant craquer madame, monsieur et leurs deux enfants. La question récurrente de la dérégulation financière associée au délitement de la structure familiale était pourtant présente dès le départ de manière diffuse, allant jusqu’à contaminer la chronique familiale de quelques incursions du genre, la maison prenant les proportions d’un protagoniste mal intentionné. Il est donc dommage de voir surgir des facilités dans les péripéties (fête incontrôlable par la fille, martyre du fils à l’école, scène de ménage publique pour le couple… à l’exception de la mort du cheval, qui, elle aussi, prend suffisamment son temps pour instiller un malaise réellement palpable) et les leçons morales comme celle du chauffeur de taxi. Pour un récit censé décaper les apparences et craquer le verni, on était en droit d’attendre davantage de subtilité.
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Créée
le 10 févr. 2021
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