Il ne prend absolument aucun détour pour plonger le spectateur dans une noirceur sans fond. Dès les premières minutes, j’ai su que ce n’était pas le genre de film que je voulais vraiment voir.
Pourtant, je ne suis pas une petite nature, mais là, c’était différent et très difficile à encaisser!
La manière dont la violence monte en intensité, si rapidement et si brutalement, m’a glacé le sang. Il y a un moment, un point culminant, où j’ai littéralement dû détourner les yeux, tant c’était insoutenable. Jennifer Kent ne nous épargne rien, et pour beaucoup, c’est là que le film trouve sa force : dans sa capacité à nous confronter sans fard à l’horreur humaine.
J'ai détesté et j'étais à deux doigt de m'arrêter là.
Le genre du "rape and revenge" me dégoûte et j'ai eu du mal à m'accrocher.
Mais si The Nightingale est difficile à regarder, il est aussi indéniablement beau.
La réalisation est tout simplement géniale.
Jennifer Kent maîtrise l’art du cadrage, et on a droit à une multitude de plans magnifiques qui capturent l’austérité et la sauvagerie des paysages de Tasmanie. La réalisatrice n'est pas à son coup d'essaie et j'ose le dire: C’est du grand cinéma, où chaque image semble avoir été pensée pour renforcer l’atmosphère oppressante du film.
Les décors naturels, le silence assourdissant, tout concourt à créer une tension palpable qui ne vous lâche pas. C’est un film qui sait utiliser son cadre, ses acteurs, et même son absence de musique pour frapper encore plus fort.
Les plans de fins qui font écho avec ceux du début sont d'une puissance magistrale et ils ont faillit me faire couler une larme. Tous comme le moment de folie vengeresse que l'héroïne traverse en pleine nuit... C'est puissant et son jeu, avec son rire tinté de folie m'a glacé le sang et ému en même temps.
J'ose le redire, c'est du grand cinéma.
Cependant, aussi brillant soit-il, The Nightingale traîne en longueur. À force de vouloir tout montrer, tout dire, Jennifer Kent étire son récit au-delà du nécessaire. C’est une histoire qui aurait pu être tout aussi puissante, si ce n’est plus, en étant plus concise. Certaines scènes, bien qu’époustouflantes sur le plan visuel, finissent par peser sur le rythme du film, ajoutant à la lourdeur d’un propos déjà écrasant.
On sort du film épuisé, non seulement par ce qu’on a vu, mais aussi par la durée de cette plongée en enfer.
Il plonge profondément dans les méandres du colonialisme, exposant sans détour les atrocités commises par l'Empire britannique en Tasmanie au XIXe siècle. Ce sous-texte politique est au cœur du film, offrant une critique acerbe des violences coloniales et des dynamiques de pouvoir de l'époque.
Le film montre avec une brutalité déconcertante comment la violence coloniale affecte à la fois les autochtones et les déportés irlandais, en particulier à travers les expériences des personnages de Clare et Billy.
Ce film ne cherche pas à offrir de réconfort ou de catharsis.
Au contraire, il dénonce la tendance à la "romantisation" du passé colonial, en particulier dans des pays comme l'Australie et le Royaume-Uni, où les cicatrices de ces époques sont souvent minimisées ou ignorées. Jennifer Kent utilise la violence crue et répétitive non seulement pour choquer, mais pour forcer le spectateur à affronter l’horreur d'une histoire souvent édulcorée. C'est un acte de dénonciation qui ne fait aucune concession, même si on peut très justement le critiquer sur cette approche peut parfois tomber dans l'excès, rendant la violence plus anesthésiante que percutante.
Le film se veut une dénonciation des atrocités coloniales, mais j'ai peur que la répétition de scènes de violence graphique sans un développement suffisant des conséquences ou des contextes peut laisser le spectateur désorienté quant au véritable message du film. Cela peut conduire à une réception ambiguë du propos politique, j'y voit un manque de subtilité et de réflexion.
D'ailleurs, j'en veut pour preuve la chose suivante.
Le film passe à côté de la complexité des motivations des personnages colonisateurs, qui sont dépeints de manière trop caricaturale, ce qui peut nuire à la profondeur du propos.
Pour moi le film frôle l'exploitation en répétant des scènes de violence graphique sans toujours justifier leur présence d'un point de vue narratif, ce qui peut rendre le message politique confus pour certains spectateurs...
C'est dommage, car ça aurait pu valoir le coup de traiter ça avec beaucoup plus de réalismes et un côté moins manichéen. Je n'irai pas jusqu'à parler d'un wokisme nauséabond, c'est juste un poil enfantin... Ce qui est paradoxale pour une telle cruauté.
En somme, The Nightingale est un film d’une rare intensité, à la fois dans sa violence et dans sa beauté. Jennifer Kent livre une œuvre magistrale qui demande une vraie endurance émotionnelle. Si vous tenez le coup jusqu’au bout, vous en ressortirez marqué, mais peut-être aussi un peu épuisé par cette expérience cinématographique éprouvante.
Le sous texte politique est bien trop enfantin pour être pris au sérieux, mais je salut quand même l'effort de traiter un thème aussi complexe, dans un film de ce genre. Un parie risqué et il a au moins le mérite d'avoir essayé.
C’est un film qui mérite d’être vu, ne serait-ce que pour comprendre jusqu’où le cinéma peut aller pour capturer l’âme humaine dans tout ce qu’elle a de plus sombre. Mais je vous avertit, ayez le cœur bien accroché, car le début est très abrupte.