NOT TO BE

The Northman de Robert Eggers se veut vraisemblablement une adaptation du mythe d'Hamlet, puisque c'est ainsi que le réalisateur nomme son personnage principal (en remettant le h à la bonne place, ce qu'on peut saluer vu qu'il n'y aura pas grand-chose d'autre à saluer dans le film), qu'on retrouve les (très) grandes lignes de l'intrigue et que l'histoire se passe en Islande (et plus au Danemark comme dans la version de Shakespeare).

Autant le dire tout de suite, du point de vue de la réécriture, c'est raté.

D'Hamlet, il ne reste que le fratricide commis par l'oncle et la dimension incestueuse du remariage entre la mère (épouse du roi assassiné) et le frère du roi (l'assassin, donc). Pour le reste, c'est le néant.

La malice et l'intelligence d'Hamlet ? Évanouies, au profit d'un personnage dont la seule caractéristique, pendant les trois quarts du film, sera la force brute et aveugle. Et la simplicité d'esprit comme le souligne pertinemment sa mère.

Les tentations et pièges auxquels Hamlet est censé résister pendant la pièce ? Inexistants également.

Après tout, il n'aurait pas fallu faire de The Northman un film subtil, ce n'est clairement pas l'ambition.

L'intérêt littéraire évacué, reste la représentation du peuple viking. Et alors là, pendant deux heures, le réalisateur enchaîne les poncifs et les clichés sans hésiter à en faire toujours plus. Les pauvres vikings subissent, encore une fois, les stéréotypes bien injustes que l'Histoire leur a attribués et ce peuple de marchands (certes prompts, à certains moments de leur histoire, à des raids humiliants à l'Est et à l'Ouest) est représenté de manière toujours plus bestiale, toujours plus sanguinaire et toujours plus ridicule. Par instant, j'ai même cru assister à une parodie, mais finalement, non. Dommage, avec des éléments de pastiche, le film aurait au moins eu un peu plus d'épaisseur.

Pour l'originalité, on repassera également. La soif de vengeance du personnage se poursuit de façon quasi linéaire, le film n'offre aucune surprise et la fin est l'apothéose de la décérébration des personnages. Les scènes plus mystiques ne convainquent pas non plus et j'avais parfois l'impression de voir un remake (plutôt bien fait ceci dit) du Seigneur des Anneaux. Mais l'épée d'Anduril, on nous a déjà fait le coup, donc faudrait voir à se renouveler.

Bref, Robert Eggers nous offre un film d'action viriliste, manichéen, bête et méchant, avec des combats irréalistes qui m'ont fait soupirer d'ennui et une bande son composée de beuglements sonores. L'esthétique travaillée des paysages ne saurait, malheureusement, rattraper tous ces défauts.

J'envisageais,* The Lighthouse*, le précédent film d'Egger, comme trop profond et complexe pour moi puisque je n'y avais pas compris grand chose, à la lumière de ce que nous montre et de ce que nous dit The Northman, peut-être n'a-t-il finalement que l'apparence de la complexité...