Depuis Wadjda, Haifaa Al-Mansour a fait son petit bonhomme (ce serait mieux d'employer l'équivalent féminin mais ...) de chemin dans le cinéma anglo-saxon avec Mary Shelley et Une femme de tête. Mais bien évidemment, on l'attendait de nouveau à domicile, histoire de prouver que réalisatrice saoudienne n'est pas un oxymore. La condition féminine est au programme de The Perfect Candidate mais beaucoup de commentateurs semblent négliger le fait que le film nous parle plus globalement de la société saoudienne, de son caractère abusivement patriarcal, certes mais aussi, dans une sous-intrigue, comment se culture, en l'occurrence musicale, est aussi constamment menacée par la puissance intégriste. Le pays a beaucoup de progrès à faire pour se libérer d'un carcan de traditions obsolètes et il est légitime de braquer principalement le projecteur sur les droits des femmes et, plus largement, c'est une lutte qui est de longue haleine, de leur place dans la société, quand elles doivent encore avoir l'autorisation de leur "tuteur" pour passer les frontières. Loin d'être un docufiction, The Perfect Candidate vaut d'abord pour son écriture, intelligente, maligne et un tantinet espiègle, qui se caractérise aussi par un certain nombre de nuances dans la psychologie des hommes (pas tous radicaux, voir le portrait subtil du père de l'héroïne) et des femmes (pas toutes pour l'émancipation). S'y ajoute un tableau de famille très réussi avec un joli hymne à la sororité, aux teintes variées. The Perfect Candidate n'est pas à proprement parler un brûlot politique, qui n'aurait jamais obtenu un visa de la part des autorités saoudiennes, mais un constat malicieux et pertinent sur le parcours de combattante que représente l'accès d'une femme à un poste de pouvoir, soit une façon ingénieuse, avec une bonne part d'audace, de faire bouger les mentalités.