La beauté profonde de An Cailín Ciúin tient à la délicatesse avec laquelle le réalisateur capte chacun des personnages et des bouleversements qui dérangent leur quotidien : la jeune Cáit, timide et distante, qui reste incomprise de ses parents et méprisée par ses soeurs, une cousine (Eibhlín) au contraire chaleureuse qui témoigne de davantage d’amour pour la petite fille que sa propre mère, le mari de cette dernière, Seán, plus rugueux et froid. Le film retranscrit l’évolution de la relation entre ce trio, en veillant à faire de la ferme un espace d’apprentissage dans lequel l’enfant étudie le comportement des autres et leur soumet le sien. En ressort la liberté de corps dans un décor ouvert, cerné par la nature et propice à l’exploration de soi. Une très belle scène de dialogue entre Cáit et Seán aborde le droit au silence dans un monde jugé sinon trop bavard ; elle rejoue l’entièreté d’un récit qui en dit plus par les plans qu’il compose – la photographie est somptueuse – que par ses échanges verbaux, marqués par les conventions. Une belle réussite.