The Red Pill
6.4
The Red Pill

Documentaire de Cassie Jaye (2016)

The red pill est un documentaire intéressant, de par son personnage principal, Cassie Jaye, ancienne féministe, qui enquête sur un sujet en principe à l'opposé de ses convictions premières.
Les milieux masculinistes, que je voyais auparavant comme des hommes souvent rejetés par les femmes... mais incapables de se prendre en main et cherchant de fausses excuses, et détestant souvent la gent féminine.
Alors... Patriarcat, ou oppression féminine ? Ce documentaire, à travers quelques thèmes, comme par exemple la forte inégalité au niveau de la garde d'enfants, souvent au profit des mères (sujet assez souvent remis en cause, du fait que les pères ne s'investissaient pas assez dans l'éducation avant le divorce... ou ne demandent pas non plus la garde). En fait, la désagréable impression que le fait d'être dans un camp, ou dans l'autre, nous faisait voir la réalité d'une façon presque opposée. Bien sûr, le fait d'adhérer à tel ou tel mouvement de pensée nous conditionne à interpréter la réalité de façon sensiblement différente, mais... Un tel écart, à ce point là ?
Le féminisme... est un sujet qui fait écho, en moi. Père absent, mère un peu trop autoritaire (castratrice ?) et un autre membre de ma famille qui fait les frais des conflits intérieurs entre un féminisme intouchable et une masculinité qu'on considère comme toxique.
Ayant pendant longtemps des blocages avec les femmes, cela n'aide pas forcément à avoir une vie amoureuse épanouie, et c'est un terreau terriblement fertile pour nourrir, pour ceux qui n'arrivent pas au final à les séduire et accumulent la frustration, une haine durable. Le problème, est... comme souvent. L'absence d'empathie, de communication. Accepter la différence chez l'autre, sa complémentarité. Qu'hommes et femmes ne sont au fond pas si différents, sur certains points, mais nier ces différences et vouloir en faire des personnes strictement identiques, c'est d'une grande violence pour les 2 sexes. Il ne s'agit pas, pour la plupart des intervenants, de nier que les hommes se soient presque toujours exclusivement approprié, non pas LE pouvoir, mais un certain type de pouvoir. La médaille à son revers : effectivement, en termes d'accidents de travail, au niveau juridique pour les peines de prison, lors des guerres... Il ne s'agit pas de dire que les femmes n'en souffrent pas non plus. Mais la souffrance est différente. Et il me semble que le mouvement féministe n'est malheureusement pas très réceptif à la parole de certains hommes, qui pourtant, élèvent la voix de façon légitime. Qu'on se le dise : je trouve que le mouvement féministe, et la libération de la parole de la femme, est une bonne chose de base. Comme tout mouvement, il existe des modérés, des extrêmes... des désaccords internes. Et... je pense que les hommes ont aussi leur rôle à jouer. Bien sûr, ils ne pourront jamais comprendre -entièrement- le ressenti d'une femme. Mais ils peuvent essayer, et y arriver avec plus ou moins de succès. Il s'agit avant tout d'écouter la parole des femmes en premier, et de lui porter considération. Et comme tout discours, cela réveillera des choses en nous, et nous fera réagir (en bien ou en mal) et... Oui, la parole des hommes a aussi à être prise en compte. Il ne s'agit pas de s'approprier la parole des femmes, mais de donner de la légitimité à la notre. Si une femme raconte son agression ignoble, et l'absence de prise de considération dont on fait part de son récit, alors, je pense que la meilleure réaction est d'écouter, de la laisser se libérer de son poids, de cette douleur et souffrance. Mais si l'homme en face a aussi vécu quelque chose de similaire, prendre la parole, après avoir écouté celle d'autrui, ce n'est pas mépriser la parole de la femme, ou lui retirer de la crédibilité. Tout le monde à le droit à la parole, et surtout, à une écoute. Alors, quand effectivement on entend dire que TOUS les hommes sont des privilégiés et des agresseurs potentiels, je comprends, les #notallmen. C'est une réaction innée, instinctive. C'est clairement une discrimination sexiste, dans laquelle un certain nombre ne se reconnaitra pas, certains seront dans le déni, d'autres, dans le rejet, et un certain pourcentage ne sera effectivement pas concerné. Car qu'on se le dise : effectivement, notre environnement, éducation d'hommes n'est pas toujours portée sur les qualités d'écoute, de bienveillance, d'acceptation de la femme... cependant, il serait aussi une erreur que tous les hommes en seront entièrement formatés, et ne pourront pas se remettre en question. Car... oui. Si certains hommes restent dans leurs certitudes, d'autres se remettent en question, essaient, avec plus ou moins de succès, de comprendre ce formatage et de changer. Les causes valables du combat féministe ne se résoudront que main dans la main.
Et je parle de cause valable, car... on a beau dire que tous les combats se valent... je trouve que non. Que ce soit le fameux débat, ridicule au possible, sur le "manspreading", les tôlés que prennent certaines affaires jetées en pature sur la voie publique (le cas du technicien d'orange...) je trouve que certaines revendications tournent plus au règlement de compte, voire à une négation du bon sens. Mettre ce combat, avec celui des abus sexuels, sur une même échelle... c'est un peu violent.
Et sous le fait que nous vivions dans un système patriarcal (ce que je ne réfute pas, mais je pense que celui ci n'est en aucun cas absolu, et à l'entier bénéfice des hommes) n'enlève pas non plus la souffrance des hommes : effectivement, nos propres clichés sur la femme douce et aimante se traduit souvent pas du laxisme en justice lors des crimes... ou, une garde souvent préférée pour la mère, avec pension alimentaire à la clé. Ce qui n'empêche pas que des hommes peuvent être de mauvais pères. En fait, j'ai l'impression que la vision est unilatérale : les 2 camps ne pourraient pas fauter. Spoiler : Si.
Les femmes peuvent être les égales des hommes en terme de violence physique et cruauté. Le cas des hommes battus existe : mais celui-ci, il est vrai, peine à se faire prendre au sérieux. Double peine pour ceux qui le subissent. Refuser de parler de ce phénomène, ou chercher à le minimiser, est tout autant horrible que de fermer les yeux sur les violences conjugales que subissent les femmes.
Je peux comprendre que vivre une oppression au quotidien donne envie d'ouvrir fort sa gueule, voir tout casser. Mais... On peut demander ça. On peut demander, que, même au bout du rouleau, les manifestations de certaines féministes cherchent le dialogue, le lien, plutôt que de voir en l'autre, l'homme (plus ou moins 50% de la population mondiale, donc) un oppresseur, un ennemi à combattre.
Les efforts sont à faire dans les 2 camps. Nous souffrons tous, pas forcément pour les mêmes raisons, pas forcément de la même façon. Nous sommes différents, certes : mais, plutôt que de rentrer dans la colère, la haine, même si c'est compliqué face un ou une extrémiste qui nous gueule sa haine et ses idées arrêtées sur le monde, plutôt que de riposter, se défendre, instinctivement : asseyons nous par terre, ou quelque chose de complètement inattendu. On ne peut pas, et dois pas, forcément adhérer à cette cause : on peut même voir ses mauvais cotés, et décider de la rejeter. Mais essayons... de ne pas céder à nos réflexes les plus primaires face à la différence d'autrui, et face, parfois, à sa haine. C'est loin d'être évident, et notre cerveau reptilien à tendance à prendre le dessus. Ecoutons. Essayons de comprendre, sans pour autant tout accepter. Il n'y a parfois rien à faire... mais essayons quand même, au cas ou. Nous souffrons tous, c'est une évidence. Alors, nous avons au moins un point commun.

mesmer
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le 13 sept. 2018

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mesmer

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