Un homme et non pas un surhomme - la résignation

Un mot : résignation. Car même s'il y a quelques faits et gestes qui porteraient le personnage à poursuivre son rêve, il est plus " raisonnable " qu'il cesse ses activités plutôt " casse-gueule " sans mauvais jeu de mots. Un calcul qui opte pour un pseudo confort ou simplement le désir tout naturel de conserver ses facultés physiques.
Mais est-ce le bon choix que de se résigner ? Agir ou ne pas agir ? Prendre des risques par la mise en application de ses rêves ou réfléchir sur la probabilité d'échec et de réussite ? Bref, vivre imprudemment en laissant libre cours à ses folies orgueilleuses, à toujours désirer plus, à vouloir l'excellence ou bien se détourner de toute mise en pratique de ses rêves et ainsi passer à côté de sa vraie vie ?
En fait le bonhomme, il était sur la voie du surhomme, mais malheureusement il est seulement homme ! Ô misère ! Ô désespoir !

Misérable condition humaine
Quand un animal souffre, on l'abat. Quand un humain souffre, il doit survivre malgré tout. "Aut pati aut mori": "souffrir ou mourir". L'humain n'a pas le droit de mourir, il doit vivre mais dans quelles conditions ?
De la résignation tout au long du film. Des dialogues assez marquants, des propos lapidaires, une tonalité " atone " à la Marguerite Duras, un personnage un poil bileux qui semble accablé par l'existence. Bien qu'il soit parfois plein de vitalité, mais cette vitalité ne se résumerait-elle pas à une lutte constante, un rapport de force (cf. le combat de lutte) ?
Les facultés physiques dont le personnage aurait besoin pour s'épanouir lui font défaut, mais il souffre plus généralement d'une incapacité à changer le cours de son existence. Une " non-prise " sur le réel mais non pas un lâcher prise, puisqu'il est en lutte perpétuelle pour la conservation de son être. Vivre résigné ou mourir épanoui ou encore s'épanouir ponctuellement au risque de perdre un des constituants de son être - le corps - comme celui qu'il appelle " frère " ?
Un regard réaliste. Une mère morte et regrettée, une sœur atteinte de troubles mentaux, un père ayant des revenus modestes, que ce dernier dépense allégrement dans les jeux, l'alcool, la beuh et autre. Bref, un contexte socio-économique désespérant. Donc un individu qui doit évoluer dans ce milieu, il est accablé de déterminisme ; degré zéro de mobilité sociale.

Soi-même comme un autre
De la bienveillance à l'égard de son ami handicapé moteur à la suite d'un accident de rodéo. La juxtaposition d'images avant-après qui te fait prendre conscience des dommages physiques du jeune garçon qui aurait pu s'épanouir, mais qui sera condamné à passer le restant de ses jours à s'illusionner dans un fauteuil roulant, pour tenter de vivre et non de survivre. En fait on serait condamné à survivre, mais la vraie vie serait une illusion.

Le rapport de l'homme et l'animal
Une bestialité de l'être humain qui se confronte à l'animal. Homme et cheval sont mis sur le même plan. Le cheval n'est pas idéalisé, ni doté d'un surplus de conscience ! Plusieurs très beaux plans ; une belle photographie et des mouvements-caméras très fluides, aériens, qui accompagnent cheval et cavalier durant leurs chevauchées sauvages. Une harmonie entre cheval et cavalier qui se fondent tous deux dans le paysage ; un retour aux sources, à la nature.
Il est vrai qu'il y a soumission du cheval (enfin c'est très respectueux, les conditions réelles de débourrage " western" sont un tantinet différentes). On observe une résignation du cheval comme condition de sa " prospérité " puisque au milieu des plaines de l'Ouest américain les chevaux ce n'est pas ce qui manque. Mais on observe également une résignation du garçon, pour pouvoir vivre lui aussi. Ils sont encore une fois mis sur le même plan.

Plusieurs questions soulevées sur l'existence humaine, sur ses désirs, son agir et ses choix. Un film frappant de lucidité.

helowtz
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le 28 mars 2018

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