Ce n’est pas The Sparks Brothers qui changera mon avis sur la façon dont est traité le documentaire musical par l’industrie cinématographique. Pourtant bon nombre d’ingrédients laissaient espérer, sinon quelque chose de révolutionnaire, au moins un bon film. Edgar Wright, mélomane notoire et adepte des trouvailles formelles et rythmiques, un groupe aujourd’hui un peu oublié de l’histoire du rock mais à l’univers singulier et toujours à la recherche d’expérimentations. En plus de ça Annette étant sortie dans la même période les Sparks avait eu un regain d’intérêts. Au final on est devant un immense pétard mouillé. La faute principalement à une paresse formelle.
Le film ne crée en effet pour l’occasion aucun dispositif documentaire innovant ou même intéressant. On est face aux sempiternelles têtes parlantes entrecoupées d’images d’archives plus ou moins rares qui viennent illustrer le propos pour que quand même tout ça ne ressemble pas trop à une émission France Culture. On a bien quelques idées pour épicer un peu la chose ou attirer l’œil de celui qui a compris que l’image ici ne servait à rien, comme des séquences en animations ou des petites blagues de montages dont Edgar Wright à maintenant le secret. Mais même en comparaison d’autres documentaires du genre c’est très pauvre. Prenez par exemple The Velvet Underground qui a un dispositif quasiment identique. Todd Haynes joue avec ses images d’archives. Il en fait par exemples des mosaïques afin d’ajouter de la matière et en donner une nouvelle lecture. Alors que dans le film de Wright c’est le niveau 0 du documentaire, aucune réflexion, sur qu’est-ce qu’on filme, comment on le film, quel impact à notre présence ou celle de la caméra sur la parole. Wright ne démontre aucune volonté de recueillir de l’information autrement que par l’entrevue, parfois ça coupe on ne comprend pas pourquoi, ça faisait peut-être trop longtemps qu’on était au même endroit. Tout ça est quand même très décevant. Il aurait été possible avec un groupe pareil d’avoir de vraies séquences musicales, des reproductions, un documentaire en comédie musicale, juste des idées enfaites.
Et encore si ce n’était que ça. Il existe des documentaires à la forme simple qui s’en servent pour raconter quelque chose d’intéressant, mais la aussi c’est raté. On reprend chronologiquement la carrière des Sparks en parlant un peu des 25 albums, 140 minutes de film pour 25 albums, comptez en moyenne 5 minutes 30 par album et vous avez votre film. On a plus l’impression d’être devant une grande excuse pour Wright d’inviter ses potes et les artistes qu’il admire plutôt que de vouloir faire un vrai film.
Alors ce n’est pas foncièrement déplaisant à suivre. Et ça, c’est grâce au talent pour le rythme et l’humour de Wright et si on ne connait pas trop l’histoire des Sparks ça nous donne quand même bien envie d’aller les écouter tous ces albums. Alors ça rend bien hommage à toute cette carrière, mais c’est tout. Pas un grand film, pas un grand Edgar Wright et pas un grand rockumentaire non plus, tout juste au-dessus de la moyenne, mais seulement parce que’elle est déjà pas très haute.