Au fond de la grotte...
THE STRANGE ONES (13,6) (Lauren Wolkstein et Christopher Radcliff, USA, 2018, 81min) : Ce road trip intrigant narre le destin de Nick et Sam deux frères (simples campeurs ou fugitifs ?) dans...
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Qui sont-ils, que sont-ils vraiment, ces deux étrangers ? Que s’est-il passé cette nuit-là dans cette maison en flammes ? Que semble fuir Nick et Sam, deux frères embarqués dans un road trip au parcours mystérieux et à l’issue incertaine ? Le physique même de Sam, très androgyne, et sa voix comme éraillée prêtent aux suppositions : est-il une fille ou un garçon qu’il faudrait à tout prix éloigner, protéger d’un imperceptible danger ? Et puis quelle est sa vraie relation avec Nick, qui dit être son grand frère et cherche à l’emmener dans une cabane au milieu de la forêt ? Est-il au contraire son ravisseur, son bourreau, un ange-gardien ou un assassin peut-être, ou même autre chose ?
Le spectateur, à l’instar de Sam (James Freedson-Jackson, impressionnant), construit ainsi sa propre perception des évènements (ce qui est réel et ce qui ne l’est pas, ce que l’on sait et ce que l’on suppose) et sa propre appréhension du temps, présent, à rebours, en boucle, remémoré. Christopher Radcliff et Lauren Wolkstein offrent bien quelques points de repère dévoilés au fur et à mesure que le film avance et se distille vers l’inconnu, mais c’est pour mieux nous perdre dans les méandres d’un suspens à accès multiples (film d’horreur, thriller psychologique, échappée sentimentale…) dont la révélation finale, comme dans Mysterious skin, déboule sans prévenir pour nous laisser tout chamboulé.
À la lisière du fantastique et du conte initiatique (renforcé par l’étrange musique à la flûte de Brian McOmber), The strange ones puise pourtant son inspiration dans une réalité on ne peut plus concrète (difficile toutefois d’en révéler la nature sans devoir trahir les secrets du film). Radcliff et Wolkstein, s’inspirant ici de leur court-métrage Deux inconnus, y créent la même ambiance chaude et lourde où tout paraît latent, menaçant, chargée d’une lumière d’été crépusculaire et hantée par la figure du trou noir (celui du blackout mémoriel, celui que dessine Sam ou celui de la grotte dans la forêt) qui renverrait autant à l’oubli et à la chute qu’à une situation difficile à laquelle il faut soudain faire face. Pour Sam, c’est la certitude terrible d’être désormais plus seul que jamais, sans rien d’autre que des souvenirs et ses démons en tête, et immobile là, en attente au bord de la route.
Créée
le 25 juin 2018
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