Comme tout bon film de Schoolsploitation qui se respecte The Substitute nous dépeint un système scolaire américain à la dérive, où les voyous sont rois, où l'éducation a échoué et où la discipline doit être restaurée. C'est littéralement l'antichambre du cauchemar conservateur due à des années de décadence libérale. Le salut ne se trouve plus ni dans les éducateurs, ni dans l'apprentissage mais dans un mercenaire qui va appliquer les méthodes des Navy Seals à l'école. Un mélange détonant pour un film aussi débile que son pitch le laisse penser.
La criminalité juvénile est une affaire délicate et complexe, surtout quand elle se gère au quotidien mais ce n'est pas grave : dans The Substitute être un délinquant est un état aussi définitif qu'inévitable et le remède est de les balancer par la fenêtre du premier étage. Le film doit énormément à Tom Berenger, charismatique et déterminé en faux prof balafré, on lit dans son regard qu'il ne plaisante pas une seule seconde en se présentant comme le "guerrier en chef" de la classe lors de sa première heure de cours. Mais il n'est pas seul à être à fond puisque notre héros va recevoir de l'aide : son ancienne unité au sein de laquelle on trouve William Forsythe dans la peau d'un type déjanté et accro à la violence. En face on nous gratifie d'un Ernie Hudson succulent de cabotinage dans le rôle d'un principal psychotique (pour situer un peu la chose il pète des planches de bois à coup de poing lors du premier entretien avec son nouvel enseignant, juste pour matérialiser sa conception de l'autorité) qui deale de la drogue pour se payer une retraite.
Car oui, tout le système est pourri, à se demander pourquoi on continue de filer du pognon pour le budget de l'éducation. On pourrait se dire que l'influence d'un adulte aussi puissant que toxique sur des jeunes qui vivent dans la misère serait un angle à creuser mais non. Il ne s'agit là que d'un élément récurrent du cinéma américain réac de ces années là. Il faut justifier que les demi-mesures ne servent à rien, que le dialogue n'apporte que l'anarchie et que seul le bon flingue dans la bonne main peut restaurer les valeurs de l'Amérique. Pas de rédemption, pas de solution pacifique. D'ailleurs le seul personnage un peu nuancé dans ce chaos, qui essaye au quotidien d'améliorer les choses sans casser des dents, se fait tuer comme un cochon à l'abattoir. L'épuration est la seule solution. La punchline est le seul discours.
L'une des plus grandes qualités du cinéma d'exploitation des années 80 et 90 c'est d'appliquer un traitement très frontal à ses sujets, presque naïf. C'est comme ça que les miracles se produisent, car The Substitute en est un. Pas de méta, pas de clin d'oeil appuyé au spectateur, pas de second degré permanent.... on est là pour voir un prof faire des clés de bras à ses élèves avec conviction et détermination. On ne peut pas dire que la réalisation de Robert Mandel (dont le plus grand fait d'arme reste le sympathique FX, effets spéciaux ) soit tonitruante. C'est même filmé avec l'ambition artistique d'un épisode de Louis la Brocante mais le sérieux, la gravité parfois, avec laquelle les situations connes s'enchaînent et se résolvent confère à ce film une aura absurde et captivante. On y voit par exemple Tom Berenger prendre son pied en tabassant ses élèves dans une bibliothèque. Le crescendo de la bêtise aboutit sur un inévitable règlement de compte au sein de l'établissement scolaire, façon western de zonards. Les paramilitaires s'entretuent de toutes les façons possibles, c'est dragées gratuites pour la fin de l'année.
The Substitute se termine sur l'image de nos héros, mercenaires esseulés recyclés en justiciers expéditifs, s'en allant vers l'horizon en laissant derrière eux le lycée complètement en ruine. Ils ont le sentiment du devoir accompli, l'ordre a été rétabli, les méchants ont été occis, mais le dernier dialogue est là pour souligner qu'ils ont aussi un cœur.
"It's too bad we had to fuck up the school. I feel bad for the kids tomorrow, man"
Voilà, c'est exactement comme ça qu'on l'aime notre Amérique.