Il y a des films qui traversent le temps sans perdre une miette de leur potentiel artistique et horrifique. THE THING est de ceux-là.
Sortie en salle au début des années 80 (1982 pour être exacte) il connut malheureusement un lourd échec commercial.
Peut-être à cause de la concurrence du "E.T" de Spielberg sortie à la même période, "THE THING" connut une deuxième chance grâce à l'avènement de la VHS.
Réalisé par un grand maître du fantastique à la carrière bien rempli, John Carpenter met en scène la peur à l'état brute.
Premier titre d'une trilogie de l'apocalypse (avec PRINCE DES TENEBRES et L'ANTRE DE LA FOLIE), THE THING est le remake de "LA CHOSE D'UN AUTRE MONDE » de Christian Nyby et Howard Hawks (1951) mais est plus fidèle à la nouvelle d'origine de John W.Campbell Jr " Who goes there?".
L'histoire se passe en Antarctique où une forme de vie extraterrestre ayant pris d'assaut une base norvégienne, s'attaque à des chercheurs américains à proximité.
L'ambiance apocalyptique du film s'impose d'emblée par ce paysage polaire, lieu de désolation, loin du monde et hors du temps. Rien ne les entoure, la blancheur des kilomètres de neige qui s'étendent autour d'eux évoquant le vide absolu (donc la mort).
C'est un lieu isolé et fermé. On apprend par les dialogues qu'ils n'ont plus de contact radio depuis 15 jours et qu'une tempête se prépare.
C'est le schéma classique de presque tout film fantastique, les personnages sont coupés du reste du monde face au danger qui les guette.
Le scénario se permet un seul déplacement, la scène de la visite de la base Norvégienne.
C'est un lieu de désolation où des restes humains jonchent le sol, où les portes sont barricadées. Une hache plantée contre une porte indique une lutte sans merci et préfigure ce que sera la base de MacReady et ses hommes.
Le bloc de glace d'où s'est échappée la créature renvoie directement au film de Nyby et Hawks.
Désormais la base devient un immense labyrinthe où le mal peut surgir de n'importe quel recoin. Carpenter utilise souvent le filmage caméra à l'épaule pour suivre ses personnages qui déambulent dans ses artères, dans de long travelling sous le son off du vent qui ajoute une grande part d'angoisse. Bien que les personnages soient souvent en mouvements, ils ne peuvent franchir les limites de la base et Carpenter crée le thème de l'enfermement d'une effroyable efficacité et développe ainsi un véritable climat de paranoïa.
Cette paranoïa gagne du terrain au fur et à mesure que le film avance. Les personnages doutent des uns et des autres et finissent par douter d'eux-même. Qui est humain? Carpenter réussi parfaitement à faire douter le spectateur sur chaque personnage et de filmer la peur et la méfiance qui s'empare d'eux au fur et à mesure des révélations.
Le casting entièrement masculin évacue d'amblé tout problème sentimental et permet de rentrer immédiatement dans le vif du sujet.
La chose, être extraterrestre qui mérite bien ce surnom, est présenté par le médecin du groupe qui a réussi a en autopsié une partie. Pris de folie, celui ci cherchera même à tuer ses collègue de la base une fois la nature du mal identifié. Il sait déjà qu'ils n'ont plus aucune chance et tente ainsi d'éviter la propagation de la chose sur toute la planète.
En effet, on a rarement vu, voire jamais vu, une telle créature dans un film fantastique. Le film ne serait rien sans les effets spéciaux époustouflants du prodige Rob Bottin.
La créature extra-terrestre peut revêtir la forme et l'intelligence de toutes créatures vivantes dans la station polaire, chien ou être humain. D'abord elle assimile ses victimes en les digérant entièrement avant de les copier à la perfection. On assiste à un déluge de chaire en fusion dans des séquences de métamorphoses digne d'un tableau de Picasso. Chaque parcelle, chaque cellule de la chose sont autonomes, même calcinée la chose vit toujours.
Cette chose qui est venue d'elle-même sous l'apparence d'un chien de traîneau, va à l'encontre d'une règle d'or du fantastique où le surnaturel est réveillé par une transgression du ou des protagonistes. Cette transgression a bien eu lieu, par l'équipe Norvégienne qu'on verra dans la séquence du visionnage des enregistrements rapportés de leur site. Images qui renvoi une nouvelle fois au film de Nyby et Hawks.
Au final, une seule alternative est envisagée, créer un brasier pour empêcher la chose de geler et d'hiberner à nouveau. Un brasier qui, comme le rappelle l'un des deux survivant, qui ne durera pas très longtemps.
THE THING se conclut par une note pessimiste, le mal pourra donc, on le suppose regagner le monde.
Zappons poliment le prequel-remake de 2011, indigne succéseur du film de Carpenter.