[Festival du film coréen 2016 à Paris - Jury SensCritique]
Premier constat, le film est magnifique. Des paysages coréens naturels, grandioses, qui font découvrir autre chose que des lieux et panoramas urbains, très présents dans leur cinéma. Le film se déroule dans les montagnes de Jirisan en 1925, où tout est dangereux et sauvage. Des loups et même des tigres (sujet central du film) y demeurent. Ainsi que l'armée japonaise qui contrôlait le pays à cette époque, avec des coréens relayés comme de simples valets : souvent des paysans pauvres et sales, vivants dans des huttes ou des petites maisonnettes construites avec les moyens du bord.
Pour le reste on est vraiment dans un film typé US orienté « nature sauvage », que ce soit la manière de filmer, la musique tantôt épique ou tragique et même au niveau des personnages, hélas vus et revus. Le pitch ne rassure pas non plus quand on nous apprend que des tigres sévissent dans la région, et qu'il va falloir les liquider. Des paysans/chasseurs coréens, habitués du lieu, sont donc envoyés par l'armée japonaise pour les traquer. Tout de suite, j'ai pensé à un « Le Territoire des loups » version Corée, c'est à dire un thriller sauvage de survie en milieu hostile, face à des bêtes dangereuses .
Du classicisme inspiré du cinéma US qui m'aurait je pense, très vite lassé.
Mais la présence de Choi Min-sik dans la peau d'un ex-chasseur vivant seul avec son fils change vraiment la donne. Rôle impeccable, charisme certain, il apporte une véritable dimension fantastique (au sens propre) au récit. Je ne peux pas en dire plus, mais son rapport avec ce fameux tigre est fascinant, touchant. J'ai été pris aux tripes jusqu'au grand final, invoquant une véritable philosophie de guerrier, digne et abondante en valeurs honorifiques.
Hélas le film se traine sur pas mal de longueurs, avec beaucoup de moments insistants sur les passages violents/dramatiques avec la musique qui va bien, pour tirer les larmes ou choquer le spectateur (le fameux aspect US). On tombe très vite dans le voyeurisme, et diminuer ces scènes de moitié avec des plans forts aurait bien plus impacté la force émotionnelle recherchée.
L'aspect surréaliste, beau, qui sonnerait presque comme un conte pour enfant, est splendide.
Mais
toute la relation entre Choi Min-Sik et le tigre
est parfois trop tirée par les cheveux et manque de légèreté pour coller à l'ambiance réaliste et historique du film. On est parfois proche d'une légende pure et simple qui aurait pu coller dans un film d'animation intégral, mais ici le décalage est souvent perturbant voire grotesque vu le contexte.
Ceci dit ce mix étrange fonctionne quand même, avec des valeurs et une morale pure, faisant de The Tiger un divertissement honnête et intelligent malgré les premières apparences.