Emmanuel Lubezki.

The Tree of Life... Prenez votre fauteuil le plus confortable, rajoutez-y quelques coussins histoire de ne pas du tout avoir mal aux fesses, trouvez-vous des enceintes qui déchirent, rapprochez votre écran et détendez-vous.

The Tree of Life est un film à voir pour son ambition, son esthétique et sa musique. La mise en scène est très propre, très jolie, la photo est magnifique et, une fois qu'on a pleinement accepté le trip contemplatif, le visionnage devient assez agréable...
Le problème, c'est qu'il est beaucoup trop ambitieux. Il y a des réalisateurs qui se rendent pas compte de l'importance de leur projet ou qui ne prennent pas en compte tout ce que cela implique, et forcément, c'est le cas pour Terrence Malick qui déclare vouloir faire un film "sur la Vie"... En 2h15...

Entre nous, je pense que même avec trente ans de développement supplémentaire pour un film dont la durée équivaudrait à un mois entier, Malick n'aurait pas pu proposer un tour complet de la question. Le pari était donc perdu d'avance mais il a essayé et le résultat est, finalement, très joli à regarder mais très creux quand on se met à réfléchir aux "grandes" réponses qu'il propose. De plus, il me semble qu'en bon mégalomane, le réalisateur avait une idée précise en tête, celle de surpasser son maître, Stanley Kubrick. 
Pour Terrence, il y a deux manières d'aborder la Vie, l'Amour est une composante essentielle, toute vie découle de l'Amour, le pardon, c'est important etc... Bref, c'est pas ce genre de réponses que je m'attends à voir dans un long-métrage de ce calibre. Cependant, y inclure Dieu, de cette manière, en traitant religion et évolution (comme dans Noé), c'est une bonne idée. Comme d'hab, des gens ont crié au créationnisme... Sans savoir ce qu'était le créationnisme... Mais ce n'est pas le sujet. 

Le film a plusieurs défauts. Déjà, le plus flagrant, c'est : Qu'est-ce que Sean Penn fout là ? Il a deux minutes à l'écran, majoritairement filmé de dos pour un rôle très superficiel et qui ne sert pas du tout la "narration". Son apparition dans le film et l'espèce de rôle qu'il est sensé tenir embrouille plus qu'autre chose. Il n'est pas utile et rend l'intro terriblement confuse pour rien.
Deuxième chose, The Tree of Life n'est pas un film sur la Vie au sens large, mais sur la vie de Terrence Malick. Père dur qui reporte sa frustration sur sa famille, difficulté pour Enfant n°1 à régler son Œdipe, découverte du Pardon etc... Ca va même jusqu'à nous montrer Enfant n°1 adulte (Sean Penn), ayant parfaitement réussi dans la vie mais malheureux à son poste car il sent qu'il a perdu la Grâce...

Mais le pire dans tout ça, c'est que je ne peux pas m'empêcher de bien aimer ce film. Les images sont sublimes, pareil pour la musique, l'histoire de la famille est basique mais bien mise en scène et le tout glisse paisiblement jusqu'à une fin indigeste, beaucoup trop symbolique. Il y a donc du mauvais, de bonnes intentions qui se cassent la gueule, mais il y a aussi du très bon. Les voix-off "à la Malick" donnent au spectacle quelque chose de très doux et onirique ce qui rend presque The Tree of Life reposant. 

Si vous ne l'avez pas vu jusque là, je vous conseille quand même de le regarder. C'est un film totalement expérimental, mystique, religieux et avec un message trop simple par rapport à la complexité du projet mais... Le trip n'est pas sans intérêt, on y découvre une nouvelle forme de narration, une autre manière de suivre un groupe de personnages et une patte artistique certaine.