Je ne fais pas partie des nombreux détracteurs de Chie là man qui, sans être réellement brillant, est tout de même généralement capable de créer une ambiance et une atmosphère autour de ses films, suscitant donc un intérêt chez le spectateur.
Malheureusement et si le climat anxiogène est ici parfois au rendez-vous force est de constater que le parti pris artistique de la caméra embarquée à la "Blair witch" ne fonctionne pas, ce qui était tout de fois plus que prévisible.
Ce n'est pas un hasard si ce concept poussiéreux fut abandonné après les "Rec" ou autres "Cloverfield", ce principe de mise en scène ayant une forte tendance à filer la migraine (et même parfois la gerbe) au spectateur, en plus d'être peu crédible pour un public averti, rôdé à ce genre de procédé.
En effet, le fait que la jeune fille cinéaste en herbe parvienne à filmer constamment et en toutes circonstances son environnement m'a ici quelque peu interloqué, Chie là man "inventant" même parfois des caméras supplémentaires lorsqu'il a subitement besoin d'un plan large, ajoutant ainsi à l'incohérence de l'ensemble.
Lorsque la caméra des "teenagers" tombe au sol, c'est bien évidemment pour nous offrir un angle parfait nous permettant de suivre la scène, lorsque les personnages courent, la caméra est systématiquement orientée dans le bon sens et a même tendance à s'attarder pour nous permettre de distinguer avec précision le déroulé de l'action. Sans parler bien entendu de l'ajustement focal et des zooms automatiques pour apprécier le décor et les personnages au second plan...
Ainsi, les quelques idées de mise en scène (il y en a tout de même) tombent complètement à plat et l'atmosphère, intrigante et anxiogène au départ, finit par s'étioler au fil du reportage confectionné par ces "charmants" petits enfants (traduire "à gifler").
La justification psycho-Œdipienne-larmoyo-lacrimo et j'en passe est également pénible, et le comportement des personnages, comme souvent dans les films de ce registre, se révèlent absurdes afin de faciliter la narration et la mise en scène du réalisateur.
Ainsi, la sœur abandonnera son frère aux mains de vieillards psychopathes pour subitement décider d'aller faire un petit tour à la cave, le "grand-père", qui est capable de mettre au sol des passants athlétiques, se fera plaquer par un gosse de 13 ans, la mère ne se souciera pas plus que ça des plaintes et des avertissements de ses enfants sur skype, les gosses ouvrent la porte de leur chambre lorsqu'ils entendent des bruits derrière, alors qu'ils ont pourtant eu la preuve formelle qu'il ne fallait surtout pas le faire etc...
Certaines scènes sont également clairement ratées, comme celle de la grand-mère qui se fout un drap blanc sur la tête (je faisais le coup à mon petit frère mais à 7 ans ça ne lui faisait déjà plus peur).
Bref, tous les poncifs et les limites imposés par cette manière de filmer sont ici présents et je ne peux que m'étonner qu'un cinéaste de cette trempe ait cédé à ce genre de facilité, probablement pour des raisons financières ou par manque d'inspiration, qu'importe, le résultat laisse plus qu'à désirer.
Je suis également amusé de constater que le "found footage" (quelle appellation ridicule...) a tendance à revenir au premier plan dans bon nombre de films ces dernières années, les studios n'ayant donc pas abandonné l'idée d'engranger des bénéfices facilement en espérant que le jeune public actuel, décérébré et ignorant, y voit une manière "nouvelle" et prometteuse de mettre en scène l'horreur et l'angoisse, faute de références et de recul pour s'apercevoir qu'elle est usée jusqu'à la moelle.
Car franchement, qui pourrait ressentir le moindre frisson ou s'extasier pour un truc aussi merdique, à part un gosse des années 2000 qui pense qu'internet et les i-phones ont toujours existé...