The X-Files, le film par 0eil
Je me suis découvert fan d'X-Files. C'est vrai - et c'est fou - mais j'aime beaucoup la série. J'en suis à la septième saison et même si je trouve que ça commence à doucement mais sûrement partir un peu trop en comics pulp, ça me plaît toujours autant. Du coup, je voulais caler le film dans la continuité mais malheureusement, pas facile à se le procurer, le bougre. Vu avec un peu de retard, les premières aventures de Mulder et Scully sur grand écran drainaient déjà quelques commentaires peu flatteurs. En outre, le fait qu'il s'agisse d'un long épisode, un spécial lancé dans les salles obscures, plus que d'un film à part entière, ça a visiblement achevé de coller aux basques du métrage une réputation de truc impayable et abscons. Ah, ben ça, c'est clair, mais bon, pour un fan de la série, quel est le verdict ? Enfin, on s'en fout, quel est mon verdict, plutôt ?
Je ne comprendrais jamais l'exercice de vouloir à tout prix porter sur grand écran des séries. Dans la majorité des cas, c'est plutôt raté et dans cette majorité-là, le pire, c'est que c'était plutôt facile. Prenons par exemple Mission : Impossible, à la limite, on pourrait presque dire qu'il s'agit du choix de la facilité. J'entends par là qu'il s'agit de respecter ce qui est presque devenu un trope, puis de lancer le métrage sur les rails de l'espionnage millimétré à base de gadgets et, même si c'est réducteur, on risque fort de toucher proche de la cible. Mais dans le cadre d'une histoire feuilletonnante, basée sur une intrigue lourde et dense, comment faire ? Alors ok, il y a le contre-pied, du genre Twin Peaks, qui inverse en fait le rapport à l'intrigue en proposant les derniers jours de sa victime tutélaire. Du coup, à la limite - je dis bien, à la limite - cela peut même être vu par les non-initiés à la série... bien que j'émets des doutes. Mais dans le cadre de X-Files ? Que faire ? Une intrigue à part ? Pfff, que non, mon ami, qui dit X-Files, dit extra-terrestre, qui dit extra-terrestre dit complot et là, on touche au méta-plot. Le problème, c'est qu'on arrive à la fin de la cinquième saison et que le complot, eh ben, il est déjà bien dévoilé. On sait à peu près tout et les rares zones d'ombre sont quand même bien minime.
La solution ? Avoir le cul entre deux chaises. Proposer une histoire qui se cale dans la continuité, mais qui apporte un élément suffisamment neuf à l'intrigue pour que cela puisse être pris en chemin par les spectateurs venus simplement tâter un peu du film. La solution de Chris Carter ? Ben... à peu près ça, mais pas tout à fait ! De base, selon Imdb, le showrunner avait dans l'idée d'achever sa série par une série de films dont celui-ci était le premier (projet assez similaire à ce qu'aurait eu en tête David Lynch pour Twin Peaks, d'ailleurs). Du coup, clairement, Carter n'avait pas dans l'idée de prendre en marche des nouveaux-venus et, même si effectivement, un élément neuf est introduit... mais d'un côté, les nouveaux se perdront dans les méandres de ce qu'implique cet élément et de l'autre, les vétérans ne verront pas trop en quoi cela apporte quelque chose à l'histoire. En prime, ça s'intercale en plus après l'intromission au forceps d'une nouvelle faction dans le plot... Aïe. Du coup, clairement, toi qui ne t'es pas enquillé les cinq saisons avant, je te conseille de passer ton chemin, tu risques de t'embrouiller pour pas grand chose. L'implication de ce virus, de toute façon, n'aura pas de grande répercutions sur la saison suivante, à part en un épisode, ça va quoi.
Au moins, le bon côté du truc est qu'il n'y aura pas de trahison du matériel d'origine : toute la fine équipe est là, jusqu'à Skinner qui fait coucou en passant, le CSM ou même Well-Manicured Man (l'Elder que je préférais, d'ailleurs, quelle tragédie). Si tous ces termes n'ont évoqué dans ton esprit que BDSM et pratiques bizarres, c'est que vraiment, tu perds ton temps, ami !
Pour en revenir au film, le matériau de base est tellement respecté que la photographie est assez souvent aux fraises, aucun plan n'a pour vocation d'être joli et tout le film est conçu de façon extrêmement factuelle, comme si l'on prenait le plus vulgaire des réalisateurs télé pour lui demander de faire trois épisodes d'affilée. En gros, même techniquement, le film n'est jamais qu'un long épisode qui ne se donne pour ainsi dire jamais les moyens d'être autre chose. Au moins retrouve-t-on avec plaisir Scully comme Mulder, inénarrable couple campé avec plaisir par Duchovny au sommet de sa forme et Anderson toujours impeccable... Note au passage qu'à nouveau, Scully s'en prend plein les dents, et qu'elle est encore sauvée par Mulder, à croire que la pauvre est condamnée !
Au final, je vais pas faire la fine bouche, j'ai eu exactement ce que je voulais et même si j'aurais préféré que le scénario s'assume jusqu'au bout et fasse vraiment avancer les choses, ben j'ai trouvé tout ça très propre. Bon, alors ok, le coup du vaisseau spatial paraît vraiment là pour attirer le badaud encore hésitant, mais tant pis. On tient là un bon divertissement, qui prolonge encore le plaisir malsain que la série a su donner à des millions de spectateurs et pour ça, c'est cool. D'autant qu'elle marque quand même - selon mes sources - la fin de l'âge d'or d'X-Files et le début de la lente agonie. Alors autant chérir son souvenir, mh ?