Dans une société vouée aux principes vertueux du libéralisme tout juste quittant les croyances religieuses, Paul Thomas Anderson filme en grossissant les traits de ses personnages, un portrait déroutant des USA.
On suit dès le début un exploitant de pétrole incarné par D.D. Lewis qui sera la source d'analyse la plus pertinente de ce long métrage.
Le film s'ouvrant en silence sur une découverte d'une nappe pétrolière et la mort d'un ouvrier, on comprend directement la volonté de montrer les vices de cette activité industrielle. Le pétrole comme industrie meurtrière et destructrice, avec à la tête notre personnage principal.
L'histoire du film est plutôt banale, ce sont surtout les choix d'écriture, des images et des mouvements qui suscitent l'intérêt.
La saleté du pétrole, le gisement montrant la réussite mais aussi la destruction par les flammes sous les yeux du protagoniste, la perversité de sa volonté de liberté montrent toute la distance qu'effectue l'auteur sur ses images.
Un personnage sans valeurs morales, qui va s'affirmer petit à petit grâce au pouvoir qu'il exerce. Ce n'est d'ailleurs pas l'argent qui le rend mauvais, mais bien comme l'atteste le début du film, sa nature profonde qui est encore enfuit.
Le pouvoir qui lui permet d'accéder à une liberté plus grande ne serait donc pas une issue vertueuse, mais l'auteur montre que l'inverse non plus. C'est là où le personnage de Paul Dano présente toute son utilité à ce message. Lui qui représente une société guidée par la croyance et l'amour de son prochain, ne se révèle que plus tard comme un moyen tout aussi similaire pour oppresser les personnes sous le mensonge et l'appât du gain.
Le film dresse un portrait nihiliste de l'humanité tout aussi comparable aux films de Kubrick dont on peut d'ailleurs reconnaître quelques similitudes cinématographiques (2001, Shining, Barry Lyndon, etc.).
There will be blood est sans doute le dernier très grand film que l'Amérique ait pu faire, et qu'elle s'interdira de faire.