Tout d'abord, There Will Be Blood c'est un prologue. Une immersion au fond d'une mine noire et muette où de roches insondables et compactes provoquent la volonté humaine. La pioche forcenée du prospecteur frappe, encore et encore, à la recherche du précieux sésame, qu'il soit doré ou de couleur pétrole.
Paul Thomas Anderson par cette introduction mutique et spectaculaire annonce clairement le voyage que nous allons faire. Se sera sans concession, frénétique et brutal.


Attiré par l'odeur profitable de l'or noir, le prospecteur Daniel Plainview accompagné de son fidèle fils, intègre une communauté de paysans du désert de Californie. Rapidement, il devient le grand seigneur de cette terre promise et du haut de son derrick impérial domine la plaine. Enfin, pas tout à fait. Au vis à vis du derrick, résiste une petite chapelle. Une modeste charpente de bois en apparence, qui essaye par l'intermédiaire du prédicateur Eli Sunday de soumettre l'entreprise pétrolière, désormais rivale, sous sa croix.


Le film est d'une beauté absolue. Depuis les grands Westerns, on n'avait pas filmé l'Ouest américain aussi bien. Ces déserts à perte de vue, ces ranchs sombres et poussiéreux contrastant avec la lumière écrasante du soleil. Un imaginaire classique d'Hollywood certes, mais qui, lorsqu'il est présenté avec tant de conviction, impose l'admiration.
On pense évidemment à Kubrick, pour ces longs travellings et autres plans-séquences hypnotiques. Mais là où beaucoup de réalisateurs souffrent d'une comparaison avec le maître, Paul Thomas Anderson offre cette même composition sophistiquée des images. Les plans sont monumentaux. L'exposé à la lumière rivalise constamment avec l'obscur, les hommes sont tantôt minuscules face à la nature, tantôt gargantuesques devant leur ennemis.


Une variété d'images et de mouvements qui souligne impeccablement la nature des personnages et le propos du film. Une leçon de mise en scène, une leçon de cinéma.
Je pourrais aussi évoquer la musique. Une orchestration volontairement discordante et dérangeante qui rajoute une dimension de plus à cette fresque dantesque.


Mais qui dit grand film, dit grand acteur. On savait déjà que Daniel Day-Lewis était une des plus grands acteurs de sa génération, mais cette performance surclasse le tout Hollywood. Il ne joue pas, il est.
Le jeune Paul Dano est bluffant également, mais le charisme de l'anglais est tel, qu'on distingue difficilement un autre que lui dans le décor. Mais leur confrontation est un pur régal. Ils luttent l'un contre l'autre de tout leur être. Les mots, les poings, le regard, l'influence, la ruse, le mensonge, la perfidie. Chaques composantes est une arme de plus pour combattre l'adversaire.


There Will Be Blood est un affrontement de tous les instants. Une escalade âpre et soutenue à la conclusion inéluctable. Un final bestial nourri par l'instinct profond des hommes. Là ou ces mêmes hommes font jaillir le sang noir de la terre.

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le 19 juin 2015

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Liverbird

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