"There Will Be Blood" est de ce genre de films que l'on peut qualifier de littéraire, d'ailleurs il est directement adapté par Paul Thomas Anderson du livre "Oil" de Upton Sinclair. Exigeant le film n'en est pas pour autant compliqué à suivre. Mais les enjeux nécessitent une certaine réflexion car les personnages, même s'ils portent assez clairement leur étiquette sur le front, sont d'une densité littéraire.
L'histoire s'étale sur plus de 30 ans, de 1898 à la crise financière américaine de 1929. Ces décennies étalent la vie de Daniel Plainview, pétrolier, qui n'aura de cesse de se confronter à deux protagonistes, son fils H.W. et Eli un faux prophète à la tête de l'Eglise de la Troisième Révélation.
Bien plus qu'un film sur l’avènement d'un empire pétrolier c'est avant tout une œuvre psychologique qui questionne les choix d'un homme pour construire cette empire. C'est donc principalement une œuvre sur la nature humaine.
Jusqu'où iriez-vous pour de l'argent ? A l'époque la religion était une affaire sérieuse et hors de question pour un athée de prétendre confesser ses péchés à un dieu qu'il ne reconnait pas. Pourtant Daniel confessera avoir abandonner son fils devant une assemblée de fidèles sous le joug d'Eli. Tout cela pour pouvoir creuser un pipeline. A charge de revanche, il forcera Eli, en proie à la crise financière, à avouer que son dieu n'est qu'une superstition. Seulement Eli n'obtiendra rien si ce n'est une partie de bowling musclée.
En plus d'une histoire froide et douloureuse, le jeu des acteurs est tortueux à en donner des névralgies. En particulier c'est le jeu de Daniel Day Lewis qui frappe. Son corps craque, se tord, évolue tout le long du film pour finir comme un Joaquin Phoenix dans le film The Master, celui-ci n'avait donc rien inventé... Ajoutons à cela des hommes baignés dans le pétrole qui finissent écrasés par d'énormes pièces de métal et là c'est l'image qui cogne. L'image cogne d'autant plus que les paysages sont ternes et inertes, tout semble figé sauf le feu qui brûle dans les personnages.
Il y a deux images qui m'ont marqué dans le film. D'abord il y a le l'immense feu qui embrase l'installation pétrolière, on sent ici la descente au enfer imminente. Et puis cette descente se conclue par la démarche rachitique de Daniel dans le bowling à la poursuite d'un Eli terrifié. La transformation de l'homme était alors achevée, il était devenu un monstre. Ca fait réfléchir.