Pour une fois que je peux lâcher de la référence culturelle avec un grand CUL, et vous tartiner au visage mon érudition aux classiques de la littérature française, je vais me faire plaisir : Park Chan-wook refait Thérèse Raquin, le roman d'Émile Zola. Sauf qu'il le fait avec des vampires, et ça marche du feu de dieux.


Le film est à peu près aussi glauque que mes vagues souvenirs d'un roman que le système scolaire m'avait forcé à lire bien trop jeune. Mais à l'inverse du bouquin où on se faisait un peu chier, Thirst un mélange improbable, mais détonant de drame, d'horreur et de comédie, rempli d'humour noir et d'une amoralité réjouissante.


C'est aussi une exploration singulière du mythe du vampire qui apporte un vent de fraicheur à un genre souvent malmené. Le film ne semble pourtant pas spécialement avoir envie de parler de vampires et ne s'embarrasse d'aucune exposition ou explication, au point d'en devenir un peu confus quand il introduit le thème en une phrase, entre la poire et le fromage.


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Thirst est très violent, et parfois sanglant, mais ne m'a jamais paru gratuit. Il n'esthétise ni ne glorifie la violence qui sert profondément le récit. Oh, et si ça vous choque, sachez que le film a une fascination étrange pour les pustules et les cors aux pieds. Vous voilà prévenu. Et quelques décalitres d'hémoglobine aussi, mais c'était sûrement implicite.


De la même manière, il ne détourne pas les yeux de ses moments les plus charnels, mais on est très loin du sexe hollywoodien aseptisé et idéalisé, où tout s'emboite du premier coup sans tatonner ni se tromper de porte. Ici, on a des scènes maladroites et pas du tout glamour où des corps s'entrechoquent et où on se prend les pieds dans des sous-vêtements retirés à la hâte. C'est souvent gênant mais aussi très intime, avec notamment un plan séquence torride qui m'a mis en immersion totale dans la charmante Kim Ok-vin.


Et puisqu'on parle de distribution, je ne connaissais pas Kim Ok-vin, mais elle habite son personnage avec une présence incroyable. Le second protagoniste est admirablement campé par l'omniprésent Song Kang-ho, que vous avez déjà vu dans Memories of Murder, The Host, Snowpiercer, et Parasite, soit la moitié des films coréens qui ont percé en occident.


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Comme d'habitude, la réal de Park Chan-wook en met plein les yeux avec des plans richement composés, aux multiples couches et où il se passe souvent plein de chose dans l’arrière ou premier plan. La direction photo est magnifique, les effets spéciaux sont assez sobres pour avoir correctement vieilli et le film est rempli de très beaux plans, toujours justifiés, délibérés et absolument maîtrisés.


Park Chan-wook se distingue par une approche naturaliste et anti-dramatique, avec une caméra parfois juste posée là, et un minimum de coupes, un procédé qui peut totalement transfigurer une scène et la rendre plus drôle ou touchante qu'elle ne l'aurait été entre des mains moins avisées.


À l'inverse, la réal se fait parfois plus démonstrative et virtuose, comme dans la scène de course poursuite sur les toits, une séquence romantique et singulièrement poétique qui crée un vrai moment de grâce dans un film jusque-là assez sombre.

Ezhaac
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le 6 mars 2024

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