Fox Searchlight Pictures s'est fait une spécialité de produire des films sortant de l'ordinaire, souvent dirigé par de jeunes réalisateurs. La branche indépendante de la 20th Century Fox a tout de même en son sein, le génial Wes Anderson, dont on retrouve une influence visuelle dans This Is Not A Love Story. Après Little Miss Sunshine, Juno où encore (500) Days of Summer, ce film est la nouvelle perle nous venant du pays de l'oncle Ben Roethlisberger.
Greg (Thomas Mann) est un lycéen quelconque. Il est invisible aux yeux de tous, sauf de son "collègue" Earl (RJ Cyler), jusqu'au jour où sa mère (Connie Britton) le force à rendre visite à Rachel (Olivia Cooke), atteinte d'une leucémie. Une amitié va naître entre eux et la vie de Greg va en être tout chambouler.
Ce n'est pas une histoire d'amour. Le titre annonce la couleur et pour éviter toute confusion avec son autre titre Me and Earl and the dying girl, on nous le rappellera quelques fois. A première vue ce ne sont pas des titres très emballant : pas d'amour et une fille mourante, on a connu plus vendeur, surtout du côté d'Hollywood. Mais là aussi, on va nous rassurer : la fille ne meurt pas, on peut ranger son paquet de kleenex et remettre son pot d'hageen-dasz macadamia au congélateur. On devient plus détendu et on peut pleinement profiter des aventures de ce trio de lycéens, sans avoir la boule au ventre.
La vie au lycée est une source d'inspiration inépuisable pour le cinéma et la littérature, pour une raison toute simple : on se retrouve tous là-dedans. C'est soit au travers d'un personnage, de l'histoire où tout simplement d'avoir voulu être à leurs places. L'identification permet d'être en empathie avec ce trio sympathique, malgré un sujet difficile : le cancer. On ne va pas nous assommer avec les séances de chimiothérapies, ni les vomissements et autres douleurs, dû à cette saloperie. Ce n'est pas pour autant traité avec légèreté, mais avec finesse et tendresse. On ne peut pas rester insensible au sourire et regard de Rachel, même si son destin n'est pas tragique, on a envie que Greg prenne soin d'elle et s'il n'en est pas capable, de prendre sa place. Elle ne passe pas son temps à s'apitoyer sur son sort et va se réfugier dans les parodies cinématographiques mise en scène par Earl et Greg.
Du cinéma, dans le cinéma. L'amitié entre Earl et Greg vient de leur amour pour le septième art. Ils se passionnent pour les classiques et refont à leur manière, des versions pas très conventionnelles d'Apocalypse Now, Macadam Cow-boy, Le Septième Sceau, etc.... je ne vais pas tous les citer, il y en a tout de même 42. L'influence du père est fondamentale dans cette passion qui les unit, grâce à Nick Offerman, une nouvelle fois fabuleux. Voir Aguirre, la colère de dieu de Werner Herzog dans ce film, accentue le côté cinéphile de l'oeuvre, ou la folie de Klaus Kinski se révèle plus douce. On peut apercevoir l'affiche de Mean Streets de Martin Scorsese dans la chambre de Greg. Un hommage de la part du réalisateur Alfonso Gomez-Rejon, qui fût son assistant. Le spectateur se retrouvant devant ce film à la sortie très limitée en France, est forcément aussi un amoureux de cet art. C'est une raison supplémentaire d'apprécier ce film.
Parce que Alfonso Gomez-Rejon a du Wes Anderson dans sa caméra. Peut-on faire un plus beau compliment ? Oui, mais cela souligne surtout la beauté des plans. C'est un peu "too much" au début, comme s'il avait voulu nous épater d'entrée de jeu. Au fil des minutes et surtout des plans, tout se met bien en place et on peut aussi bien apprécier la fluidité du récit, que les angles et mouvements de caméra. C'est principalement dans la chambre de Rachel, qu'on se régale. Cela aurait pu être un huis-clos, tant ce lieu est; malgré tout; rempli de vie. Les coussins sont de toutes les couleurs, les murs parlent et la lumière filtre tendrement sur le doux crâne de Rachel. On sourit, on rit et parfois on est attendri, au point de sentir la petite larme au coin de l’œil, voulant aussi assister à la séance.
A la fin, on comprend mieux ces grand prix du jury et surtout du public à Sundance. Au contraire, ce sera difficile d'expliquer son flop, alors qu'il a tout les ingrédients pour séduire un large public. La vie est faite de mystère, je ne vois pas d'autres explications.
L'adaptation de la nouvelle de Jesse Andrews; dont il s'est lui-même chargé; est une belle réussite. On passe un agréable moment en compagnie de ce trio de lycéens, de leurs parents et professeur. Une comédie pas romantique, ni dramatique, mais tendre comme l'amitié.