Le masque est finalement tombé. Taika Waititi avait copieusement surfé depuis 2014 sur l'aura de Vampires en toute intimité et À la poursuite de Ricky Baker, films plutôt rafraichissants qui donnaient des lettres de noblesse à la comédie néozélandaise. Il avait quelque peu confirmé avec Thor Ragnarok et Jojo Rabbit, même si on commençait à subodorer qu'il allait très rapidement atteindre ses limites. Et bien ça n'a pas loupé, son septième long-métrage est complètement raté. Rassurez-vous, on ne tombe pas non plus dans le nanard (oui, moi j'écris "nanard" comme ça) car il y a tout de même quelques trucs à sauver, mais ces trucs ne viennent pas de lui (le set-piece en noir et blanc par exemple), mais des équipes de chez Marvel qui chorégraphient toutes les scènes d'action bien en amont du tournage.
En ce qui me concerne j'ai vu ici le pire Marvel. Pire que Hulk, pire qu'Ant-man et la Guèpe, pire qu'Iron-Man 2 et bien pire que les autres volets de la saga Thor. Je ne sais pas quelle sera la suite mais il faudra tourner la page et revenir à quelque chose de moins guignolesque à l'avenir.
Ce qui saute aux yeux après le visionnage du film c'est le triste constat que Taika Waititi est devenu un boomer. Je le sais car moi aussi j'en suis un. Son humour a pris un énorme coup de vieux en l'espace de seulement 5-6 ans. La formule qui fonctionnait plutôt bien avec Ragnarok (même si je suis l'un des rares sur ce site qui préfère les deux premiers opus) se vautre ici dans le ridicule, tous les potards sont à fond, Waikiki est en roue libre et dénature totalement son récit, anéantissant avec gourmandise les plus petits espoirs de gravitas qu'exige le contexte mythologique d'une telle adaptation (un mélange de deux arcs du comics publiés entre 2013 et 2018). On est franchement embarrassé pour Russel Crowe lorsqu'on voit son interprétation de Zeus, grecque et lourdement effeminée. On est navré pour Jamie Alexander (Sif) et ses trente secondes de dialogue mal récité, mal écrit, et surtout inutile. On se facepalm pour le caméo (car c'en est un) des Gardiens de la Galaxie dont on nous a survendu la présence. Il y a aussi les enfants, Waikiki en fout partout, dans tous ses films. C'est horrible. Il faut arrêter avec ça, définitivement ! Et puis il y a trop de blagues lourdingues, tout le temps, et tellement que les rares moments où ça s'arrête, la cassure est tellement violente qu'on sort totalement du film. Les seuls personnages intéressants du film sont les deux chèvres... Vous trouvez ça normal ? En l'espace de deux films (sans compter Infinity War et Endgame), le dieu du tonnerre est devenu débile. Alors bon, pourquoi pas ? Mais encore faut-il ne pas vouloir le beurre et l'argent du beurre. Si vous voulez faire du Deadpool faites du Deadpool, mais n'adaptez pas des histoires épiques qui requièrent un minimum de profondeur, inventez quelque chose d'autre.
D'ailleurs la scène post-générique dans laquelle un Zeus ressucité et en colère, interpelle Hercule (Brett Goldstein numériquement défiguré) me fait penser que l'on risque d'avoir droit à une adaptation d'Hercule l'Olympien de Bob Layton, en film ou en série. Ce qui augurerait d'aller encore plus loin dans la connerie puisque ces deux histoires, elles, sont nettement plus dans le ton employé sur Ragnarok que n'importe quel arc du comic Thor.
On ne devrait plus laisser Waikiki toucher à des sagas cinématographiques. Il ne devrait s'atteler qu'à des films originaux dans lesquels il n'aurait pas à respecter une quelconque cohérence vis-à-vis, ou de l'oeuvre dont ils sont adaptés ou des volets précédents. Car il n'a pas le talent nécessaire pour l'irrévérence dont il veut se faire l'apôtre.