Je le confesse : je ne déteste pas ce garçon. Je sais qu'en affirmant ça, je me mets à contre-courant des avis globaux de Senscritique, bien différent du public Youtube, pour le meilleur et pour le pire. Mais je pense que c'est infondé de le mettre dans le même tas que ces inombrables pseudo-critiques ciné qui déblatèrent sur ces vidéos : Clapman, Fermez-là ou Regeleglioria sont tous trois des prototypes de formatés, allant voir des films sans problèmes d'exploitation et exprimant un avis souvent basé sur un ressenti plutôt que sur une analyse réfléchie. Sans évoquer cette recherche d'effet putaclic insupportable, qui consiste à aller voir des films que l'on sait haïs d'avance, mais qu'on encourage quand même en allant les voir... Quelle horreur, ça ! Inthepanda aussi, me direz-vous, et c'est vrai à quelques exceptions près. Mais là où il se différencie radicalement de ses camarades, c'est sur la forme. Son envie d'aller plus loin. D'ailleurs, il a toujours répété ne pas vouloir être "le gars qui râle et détruit le cinéma français". Ça fait des années qu'il a arrêté de se filmer en train de parler à chaud d'une projection. Ça fait des années qu'il joue avec les Lights pour créer des atmosphères à ses critiques. Ça fait des années qu'il regarde des films divers, beaucoup plus divers que, au hasard, Durendal. Il éclate Durendal, sans problèmes, pour moi la concurrence se pose pas ! D'un côté, t'as un étudiant en cinéma qui te dit qu'il n'y a rien à raconter sur les films d'auteur mais qui ne réalise rien de concret (dans nos écoles de cinéma, entre nous, on les appelle "les guignols" ces gens-là, et généralement on ne bosse pas avec eux, ça explique beaucoup de choses), de l'autre tu as un gars qui multiplie les tentatives de réalisation, plus ou moins réussies bien entendu, mais au moins il cherche à faire de sa chaîne quelque chose d'aussi poussé que le Fossoyeur dans les intentions. Le bonhomme est très très orgueilleux, c'est clair, mais il garde cependant une qualité animatrice que je trouve hyper entraînante ! J'aime sa clarté, j'aime son côté cool et en même temps très concis, que n'ont pas du tout par exemple Fred et Seb de JDG (que je respecte pourtant ; mais franchement, leurs critiques ciné, c'est le fond dans le genre). Quant à ses documentaires, je suis partagé : d'un côté je ne m'ennuie pas, il m'arrive même d'apprendre certaines choses, et je ne passe pas un mauvais moment ; d'un autre côté les fractions fictives sont insupportables. C'est d'ailleurs pour ça que celui sur Tarantino est absolument irregardable, vraiment. Parce que quasi tout est fictif, et lorsque cela devient un peu sérieux, donc documentaire, c'est gâché par un rire forcé irritable au plus haut point, venant du réal lui-même.
Pour résumer mon avis sur ce mec: il n'est pas encore né. Mais je pense honnêtement qu'il faut juste le lui laisser le temps. Il n'est pas, et ne sera jamais, Karim Debbache ; c'est un autre style, et il a encore besoin de mûrir d'un point de vue culturel et analytique.
"Tim Burton est mort ?" est d'ailleurs pour moi un archétype de ce qui marche et ne marche pas chez lui.Il cherche à surprendre, à se surprendre lui-même aussi, et confronte plusieurs avis sur la question ("Burton a lâché pour la facilité", "Oui, mais ces facilités renforcent son originalité dans le cinéma actuel" etc.). Bon, des arguments sont nazes (Burton choisit les mauvais scénarios volontairement ? Mon sourcil s'en est pas remis), mais la plupart se tiennent dans leur côté débattables. Je trouve ça bien de sa part, il reste pas dans ses préavis. Je suis également tout-à-fait d'accord sur le film qui a entraîné la débandade chez ce réalisateur, que je ne suis plus moi aussi. Quant à la partie purement instructive, certes j'apprend rien de nouveau personnellement, mais il n'empêche qu'il fouille intelligemment. Il ne dit pas que des terrains battus, loin de là.
Par contre, l'aspect fictif du truc...
Piano dégoulinant de mièvrerie dans les 30 premières secondes. Dialogues et jeu d'acteur au fraise. Monologue final de la "victime" qui m'a fait penser à une caricature de One Piece en terme d'écriture (quand le perso gueule, et que t'as la bulle du perso récepteur avec trois points en suspension ; ben voilà). Mise en scène très étudiante (et croyez-moi je les reconnais). Humour : 0. En fait, à part l'idée du fan-club, que je trouve très cool pour son propos allégorique du côté rassembleur du cinéma, en même temps que témoin du temps qui passe, tout est à jeter. La fin, je n'ai pas pu la regarder jusqu'au bout à cause de ça. Là-dessus, il a un très sérieux progrès à faire : c'est pas non plus du Fermez-là (difficile de faire pire en même temps), mais c'est pas aussi pro qu'il veut le faire croire. En fait, c'est même pas du tout pro. La définition de la caméra et la sensibilité des micros ne suffisent pas. Ce ne sont que des outils.
En somme, j'ai de la sympathie pour lui comme j'ai de la sympathie pour le travail de pas mal de mes camarades de l'ESRA. J'arrive à écouter ses parties documentaire en me disant qu'il est encore débutant, et qu'alors ces débuts sont pas mal du tout. Bon, par contre, va falloir sérieusement durcir son travail et se remettre en question pour progresser niveau fiction... Mais je pense sincèrement qu'il en est capable, comme n'importe lequel de mes camarades de mon école de cinéma. Ce qui compte, c'est se dépasser, il en parle d'ailleurs ; alors qu'attends-tu pour le faire, mec ?