Ce lumineux objet du désir.
Je dois la vision de ce film à Pascal Thomas, venu le défendre avec fougue aux micros de Stephane Bou et Thoret sur France Inter il y a quelques temps, enchanté par la grâce de ce film qui n’avait pas l’exposition méritée à ses yeux.
Pour qui connait le cinéma intimiste et tendre de Thomas, on peut comprendre sa sympathie pour ce film, tout comme on comprendra à quel point sa francitude pourra irriter un certain nombre.
Le film joue avec lucidité sur un cadre on ne peut plus convenu : deux frères médecins amoureux de la même femme. Leur profession permet d’explorer une nouvelle fois cette position ambivalente entre le curateur et l’être fragile : l’un est alcoolique (mais en phase de rémission, dans son versant propre à l’image, si on veut), l’autre un peu maladroit dans sa socialisation. On soigne, on écoute les gens dans un quartier chinois qui profite de la générosité de ces deux personnages sans femme ni enfants, apparemment entièrement dévoués à leur profession.
Un rien démonstratif par instant, un poil trop écrit dans certaines répliques, le scénario n’évite pas certaines maladresses. Celles-ci sont néanmoins souvent excusées par la tonalité générale, très douce, et des comédiens tous excellents ; le spectateur est sans doute aussi troublé que les frères célibataires par l’irruption de Louise Bourgouin, d’une splendeur discrète et dont les sourires vernissent les fêlures. Surtout fondé sur l’ellipse quand il s’agit d’évoquer les aspects les plus saillants du mélo (l’amour, les crises des malades…) le film tisse avec délicatesse et une empathie profonde la destinée feutrée de personnages en prise avec la vie. On n’oubliera pas de sitôt le plan montrant Judith après l’amour, en plongée, sa chevelure ruisselante au sol, le visage serein, dans cet état de suspension qui prolonge la fusion avec l’autre tout en évitant de la verbaliser.
Ce genre de passages prouve avec force le regard d’Axelle Ropert qui se révèle à son tour le médecin de cœurs : en empathie avec des personnages délicatement perdus, en quête d’un amour qu’ils semblent oser une dernière fois appréhender avant le renoncement définitif.