Double ennui

Ces temps-ci, je dors bien, je suis reposé, je suis zen, et je me sens capable d’encaisser un nouveau Steven Seagal en à peine quelques jours sans avoir peur que mon cerveau fonde par mes oreilles. Oui, je suis comme ça, je suis un aventurier de l’extrême. Et puisque j’ai décidé de me faire toute la filmo de Saumon Agile… Ah, on peut dire qu’en 2005, il était devenu Panda Bouffi. Donc, puisque j’ai décidé de me faire toute la filmographie de Panda Bouffi par ordre chronologique, c’est au tour de Double Riposte, Today You Die en VO, réalisé par Don E. FauntLeRoy, directeur photo sur des films tels que Jeepers Creepers ou encore Anaconda 3 et 4 qui s’est également essayé à la réalisation. On lui doit justement les chefs d’œuvres Anaconda 3 et 4, mais aussi deux autres films de Seagal, Mercenary (2006) et Urban Justice (2007). Mais on reviendra à ces deux derniers en temps voulu. Pour l’instant, l’heure est à Double Riposte, et comme on pouvait s’y attendre, ce n’est pas bon, mais vraiment pas bon du tout.

A l’instar du film précédent, Piège en Eaux Profondes, Seagal a encore fait des siennes durant le tournage. Arrivant sans cesse en retard, se prenant pour le roi du monde, changeant sans cesse le scénario, c’est ce coup-ci avec le producteur Avi Lerner qu’il y a eu des brouilles au point que les deux hommes sont restés en froid de très nombreuses années, Seagal refusant même de jouer dans Expendables car Lerner était à la production. Mais ce n’est pas tout puisqu’Anthony ‘Treach’ Criss, très content de jouer avec Seagal au départ, a vite déchanté après que ce dernier l’ait immédiatement pris de haut et a eu des propos condescendants avec lui. Un vrai professionnel. Double Riposte signe également le retour des rappeurs dans la filmo de Seagal, avec ce coup-ci Anthony Shawn Criss, Treach de son nom de scène, qui a été le leader du groupe de hip-hop Naughty by Nature. Premier problème, son duo avec Seagal ne fonctionne pas. Ça a de quoi nous faire sourire à une ou deux reprises au début, mais le reste du temps ça vire vers le soupir. Seagal, lui, est toujours aussi mauvais, marmonnant ses répliques sans grand entrain ni crédibilité. Pire encore (du moins dans la VO), il se ridiculise lorsqu’il prend un accent de rappeur black et parle comme s’il venait d’une banlieue pauvre new-yorkaise. On en vient à regretter son accent italien ridicule (mais fun) de ses débuts. Même chose pour les cheveux, ce n’était pas si mal en fait sa petite queue de cheval. Là, c’est juste indescriptible. Une fois de plus, il est clairement désormais trop vieux pour ces conneries mais il ne veut pas lâcher l’affaire, le reste de sa filmographie à venir étant là pour le prouver. L’histoire est ici très mauvaise, avec des trous gigantesques dans l’intrigue, ce qui semble normal vu tous les changements en cours de route que Seagal aurait forcé à faire. Par exemple, qui est cette fillette que Seagal va voir à l’orphelinat à la fin ? A aucun moment elle n’est mentionnée. Peut-être était-elle prévue initialement, mais elle semble avoir disparu en cours de route pour revenir à la toute fin. Pourquoi nous parler des « visions » de sa femme si ce n’est pour rien en faire ? Ça n’a parfois aucun sens.

Le pire dans tout ça, c’est que la meilleure scène du film, la poursuite avec la voiture volée, provient d’un autre film, Les Rapaces (1997), Top of the World en VO, bobine méconnue avec Peter Weller et Dennis Hooper. Double Riposte emprunte d’ailleurs à plusieurs autres films : The Order (2001), Onde de Choc (1998), Ultime Violence (1994) et Un Seul Deviendra Invincible (2002). De là à dire que nous sommes dans un tournant dans la carrière de Seagal… Mais il s’agit ici d’un film d’action, alors qu’en est-il à ce niveau-là ? Eh bien sorti des stockshots d’autres films de Nu Image / Millennium Films, pas grand-chose à se mettre sous la dent. Les combats impliquant de l’aïkido sont expédiés en 2 secondes et exécutés par la doublure de Seagal, et on ne retiendra des gunfights que leurs légers excès de violence et de sang car plombés par un montage très hasardeux. Mais pour en revenir aux combats, c’est simple, ils sont quasi intégralement filmés avec Steven Seagal de dos ou à bout portant (mais pas plus haut que le cou), permettant de mettre sa doublure sans problème, sauf que cette dernière est plus affûtée et n’a pas la même démarche que Seagal. En plus de tous les problèmes déjà cités, la mise en scène de Don E. FauntLeRoy est très téléfilm de bas étage. Il se contente de filmer sans entrain, avec le strict minimum, possiblement à cause des différentes brouilles avec Seagal. On se pose sincèrement la question de pourquoi les gens ont continué de regarder des films de Steven Seagal. Parce que s’ils ne rapportaient pas d’argent, ils auraient arrêté, mais s’ils ont continué d’en faire, c’est que ça ramenait de l’argent. Moi je continue, parce que je me suis lancé un défi à moi-même, pour tester ma résilience, mais les gens qui l’ont suivi pendant de très nombreuses années, même lors de cette période sombre de sa filmographie, pourquoi ont-ils fait ça ? Nous n’aurons sans doute jamais de réponse à cette question…

Avec l’insert massif de stockshots provenant d’autres films de chez Nu Image / Millenium Films, la carrière de Seagal s’enfonce, avec ce Double Riposte, un peu plus dans les tréfonds de l’enfer cinématographique. C’était très mauvais !

Critique originale avec images et anecdotes : https://www.darksidereviews.com/film-double-riposte-de-don-e-fauntleroy-2005/