Que reste-t-il de la famille en déclin décrite par Ozu? Des bribes: l'occidentalisation a dispersé Tokyo.
Tokyo-Ga est ce qu'il reste du Voyage à Tokyo de Wim Wenders. Ce n'est pas un récit de pélerinage, car ce n'était pas un pélerinage. Wenders déambule dans un Tokyo mondialisé, remodelé. Ce qu'il reste de Tokyo-ga, c'est peut-être le silence de Chishu Ryu, la caméra tatami et une ultime séance de tournage de l'impermanence. Wenders est l'homme à la caméra qui parle et qui écoute pour ses souvenirs, en mémoire de ses souvenirs.
Et finalement, lost in translation: une floppée de parapluies, Vanina de Dave, Johnny B Goode, jupes Vichy, converses, manteaux de cuir et derbies noires. Sweatshirts, casquettes, fleurs en tulle. Tokyo de jour,Tokyo la nuit, consoles rétro, enseignes, l'oeil de Chris Marker et la voix de Wim Wenders, toujours la même. Pour conclure on peut la reprendre et synthétiser son périple: "dans le petit garçon du métro j'ai voulu reconnaitre l'un des sales gosses du film d'Ozu".
Si le spectateur est comme Wenders amateur d'Ozu, ce périple est aussi le sien. Si le spectateur est frais comme tout, il saura apprendre de ce Tokyo cosmopolite. Dans tous les cas, reconnaissance à l'oeuvre. C'est un des films qui peuvent nous "élire" pour reprendre les termes de Luc Dardenne. J'ai été élue par ce film, parce qu'il n'est pas un, il est multiple: il est celui d'une génération.