Quel était donc ce film à l’affiche jaune qui, sous forme de carte postale, ornait parmi d’autres le mur de ma chambre d’adolescent ? C’était TORSO, dont le titre original est "I corpi presentano tracce di violenza carnale" !!
Avant qu’il ne se fourvoie dans de médiocres comédies ou séries pires que Z, qui auraient peut-être mérité pour l’occasion la création d’une vingt-septième lettre à l’alphabet, Sergio Martino a mis en boite au début des années 70 quelques gialli de bonne facture : "L’étrange vice de Madame Wardh", "La queue du scorpion", "Toutes les couleurs du vice" ou encore "Ton vice est une chambre close dont moi seul ai la clef". A l’évocation de ces doux titres on peut naturellement penser que nous avons affaire à des films baignés d’érotisme et, en effet, comme dans TORSO, celui-ci a une place prépondérante.
Film le plus intéressant du transalpin, TORSO déçoit par une première heure poussive, particulièrement ennuyeuse malgré une mise en scène exponentielle de crimes relativement habile. Les trente dernières minutes sont quant à elles plus directes, plus graphiques et correspondent pleinement aux pulsions devenues grandissantes de l’assassin mais surtout, aussi, dues à celles d’un public déjà de plus en plus demandeur de brutalité et de perversité. Mieux cimenté, le film devient alors épatant dans son exploitation du suspens et de l’angoisse morbide, liant parfaitement le silence à la violence visuelle des cadrages incroyablement explicites pour l’époque. A cet effet, les séquences dans lesquelles l’héroïne se cache dans la garde-robe et observe le tueur découper ses amies sont très réussies. Son regard à travers la fente de la penderie d’où elle essaie de ne pas crier, de ne pas se faire prendre, crée les meilleurs moments du long métrage. Les plans élégants deviennent alors les points de vue de la proie et placent ainsi le spectateur en plein coeur du carnage.
Ce n’est pas un film recommandable mais il est très important de par son influence sur le slasher américain (le tueur a vécu une expérience tragique et traumatisante, il assassine les fautifs ou ceux qu’il considère comme tels, il voit en eux des fautes, des mauvaises actions, etc.) et je suis comme certains d’avis que TORSO est, même si "La Baie Sanglante" de Mario Bava avait ouvert de nombreuses pistes, le premier du genre, juste avant le "Black Christmas" du canadien Bob Clark sorti l’année suivante, en 1974. TORSO n’est donc pas, malgré sa chiantitude, un mauvais film.